N°9 / L’Europe et « ses » juifs. Une première approche

L’Italie et « ses » Juifs : mobilités, modernités, identités

Davide Mano

Résumé

Cet article interroge le processus de construction de l’identité juive dans l’Italie moderne à travers une réflexion sur les approches historiographiques. L’analyse proposée s’intéresse à trois moments qui ont marqué l’histoire des Juifs italiens : la diffusion du marché du crédit au XVe siècle, abordée à travers l’étude des mobilités juives ; la création des ghettos au XVIe siècle, considérée à l’intérieur de la tension entre projets conversionnistes de la papauté contre-réformiste et processus d’acculturation des Juifs à la société italienne ; et le parcours d’émancipation juive, présenté dans le contexte de transition politique et culturelle qui fut mis en œuvre pendant le XVIIIe siècle.

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Cet article s’intéresse au parcours de construction identitaire des Juifs italiens ainsi qu’à l’histoire des attitudes catholiques à leur égard à l'âge moderne. Dans un premier temps, je focaliserai mon attention sur deux passages essentiels de l’histoire des Juifs italiens, à savoir la diffusion du marché du crédit au XVe siècle et la ghettoïsation au XVIe siècle, sur lesquels l’on dispose déjà d’un certain nombre d’études approfondies. Je montrerai dabord comment le thème de la diffusion du marché du crédit a été abordé à travers l’étude des mobilités juives ; la réflexion autour de l’œuvre pionnière du médiéviste Michele Luzzatti a donné vie à une production scientifique riche, s’attachant à l’histoire sociale des familles et aux données prosopographiques[1]. Cette sensibilité a contribué également à l’évolution des études sur la ghettoïsation, entendue comme tournant historique ayant marqué profondément et durablement les sociétés juives de la péninsule. La multiplication des ghettos dans l’Italie du XVIe siècle a été considérée à l’intérieur de la tension entre projets de conversion de la papauté et processus d’acculturation des Juifs à la société italienne, sans négliger les aspects d’histoire juridique et de mentalité économique[2].

Dans un deuxième temps, je me focaliserai sur les développements concernant les Juifs italiens au XVIIIe siècle. Je tenterai de comprendre pourquoi l’historiographie a accordé moins d’importance au siècle des Lumières, à ses courants réformistes et à sa première transition révolutionnaire. Il manque aujourd’hui une lecture d’ensemble, apte à réunir les avancées de la recherche et à redéfinir le rapport entre le processus de formation d’une identité juive italienne, le tournant de l’émancipation et les résurgences de la violence antijuive. Ces trois phénomènes particulièrement complexes montrent bien quels sont les défis historiographiques pour le domaine des études juives italiennes.

L’Italie et « ses » Juifs : de la tradition paternaliste aux approches d’histoire sociale

Au fil de son histoire bimillénaire, l’Italie juive a été une extraordinaire « chambre du temps » des caractères culturels anciens se sont conservés pour longtemps, dans le rite, dans la prière et dans les institutions communautaires[3]. En même temps, le judaïsme italien a constitué un laboratoire de la modernité : dans ses développements historiques, ses mêmes caractères originels se sont adaptés à des conditions toujours en mutation, en suivant les destins des états d’accueil du sud au nord de la péninsule italienne, mais aussi en absorbant les cultures de populations juives originaires d’autres régions d’Europe et de la Méditerranée.

Au cours des siècles, la minorité juive a cherché constamment à produire une médiation dans l’espace italien, à concilier tradition et innovation, conservation et ouverture, spécificité et pluralisme culturel. Comme l’a noté Francesca Bregoli, les Juifs italiens ont incarné une projection vers la modernité pendant toute leur histoire, que ce soit dans leur parcours d’intégration culturelle ou dans leurs tentatives de concilier l’ancien avec le nouveau, le nouveau avec l’ancien[4].

Pourtant, de telles conceptions du parcours de modernisation juive, entendu comme résultat d’une action dans l’histoire et d’un processus de transformation internes et spécifiques aux Juifs, n’ont pas été toujours au cœur des débats historiographiques. De la même façon, la question des degrés d’acculturation des Juifs dans la diaspora, à savoir leur réceptivité des faits sociétaux et association aux courants culturels du pays d’accueil, n’a pas été non plus considérée comme un sujet de recherche louable pendant longtemps.

Le plus souvent, l’historiographie traditionnelle s’est penchée sur l’étude des attitudes variables des états italiens à l’égard des minorités juives. Ce faisant, elle s’est focalisée sur le contexte chrétien, en adoptant d’une manière paradoxale le point de vue de la société dominante[5]. Comme l’indiquait Giovanni Levi déjà en 1998, « l’on connaît beaucoup plus de choses sur l’attitude catholique italienne envers le judaïsme que sur l’expérience des Juifs eux-mêmes, sur le sens donné par eux-mêmes à leur situation d’incertitude perpétuelle, à leur existence faite de contrôles, expulsions, limitations, réclusions, mais aussi de négociations, protections intéressées et dépendances »[6].

Ce problème culturel a limité fortement la reconstitution de l’histoire des Juifs italiens jusqu’à très récemment, comme démontré par des approches – pas seulement historiographiques – qui peinent à saisir la complexité du cas italien et à en détecter les transformations dans le temps et dans l’espace[7]. Si une perspective théologique et une vision paternaliste de l’histoire juive ont constitué les traits marquants des études de cas régionaux adressées au grand public, les ouvrages d’encadrement général ont souvent fini par céder à une chronologie évolutionniste des relations entre Juifs et chrétiens, dans le souci d’offrir une lecture consolatrice de l’histoire italienne[8].

De ce fait, une idée stéréotypée de l’histoire juive, vue comme expérience passive, histoire de victimes ou encore histoire d’un peuple enfermé en soi-même, s’est banalisée[9]. Pareillement, l’une des spécificités de l’histoire des Juifs italiens, à savoir l’expérience de forte mobilité vécue par de nombreuses familles, n’a été reconnue que tardivement comme fait historique et sujet d’investigation à part entière[10].

Plus récemment, des aspects inédits du passé juif italien ont cependant fait l’objet d’analyses fécondes. L’accès à des fonds d’archives importants et relativement peu étudiés a été l’une des préconditions pour ces recherches, qui ont marqué un tournant dans l’historiographie des Juifs italiens en donnant voix à des nouvelles lectures de la relation entre judéité et italianité au fil de l’âge moderne[11]. Pareillement, l’adoption d’approches novatrices d’histoire sociale, institutionnelle, économique, ou encore intellectuelle, a été d’une importance capitale.

De nouvelles enquêtes d’histoire institutionnelle ont contribué à lever le voile sur une action diplomatique juive face au pouvoir chrétien, visant à la réduction des abus antijuifs et à l’exécution de normes juridiques précises pour la protection des populations des ghettos et de leurs activités commerciales[12]. Le processus de fixation des communautés juives en tant qu’institutions religieuses sous contrôle de l’état a fait l’objet d’études focalisées sur la création des ghettos au XVIe siècle[13]; tandis que la reconstitution des classes mercantiles émergeantes sépharade et marrane, avec ses réseaux d’intérêts à l’échelle régionale et internationale, a été au cœur de recherches très fructueuses sur l’espace économique italien comme lieu de rencontres et de familiarisations[14].

Une place importante a été également accordée au sujet des mentalités économiques au passage vers l’âge moderne, avec une attention particulière à la naissance des banques et à la création des marchés du crédit[15]. L’histoire sociale a eu quant à elle un rôle central dans le développement de la recherche sur la famille juive, sur les stratégies matrimoniales et sur la condition des femmes[16]. Des relectures novatrices ont montré finalement comment le parcours d’intégration des Juifs à la culture italienne a été modelé de manière à concilier la sociabilité avec la vie religieuse traditionnelle. L’ouverture au savoir scientifique, aux courants culturels et aux transformations politiques du monde non juif, semble avoir eu un rôle plutôt positif dans ce processus d’harmonisation entre ancien et nouveau, sans que cela entraîne forcément des ruptures[17].

Tout en gardant une spécialisation régionale marquée, ces études ont apporté une lumière nouvelle sur la réalité complexe des stratégies de survie, des systèmes de protection, des réseaux socio-économiques et des pratiques culturelles auxquels les Juifs italiens ont eu recours pendant l’âge moderne.

Face à la première modernité : un judaïsme nomade, disséminé et diversifié

La transition vers un système de marché du crédit est l’un des enjeux décisifs déterminant la fin du Moyen Âge et le début de l’âge moderne. Parmi les développements les plus significatifs de ce processus, l’historiographie a attiré l’attention sur l’émergence d’une nouvelle figure sociale dans l’Italie centrale des XIVe et XVe siècles : le banquier-prêteur juif. Des marchands juifs prospères furent effectivement appelés à exercer le prêt sur gage dans des villes et agglomérats semi-urbains dabord du centre, puis du nord de la péninsule. Le rôle dintermédiaires et dentrepreneurs financiers assumé par ces acteurs faisait partie dune stratégie papale pour renforcer son hégémonie dans les centres urbains assujettis à sa domination. De plus, le phénomène reflétait les aspirations des seigneurs italiens, intéressés à garantir la circulation de la monnaie. En effet, les prêteurs juifs étaient appelés à avancer aux communes largent dont elles avaient besoin autant pour animer le marché local que pour payer les charges fiscales imposées par Rome[18].

Dans une phase d’expansion de la finance et du marché du crédit, ces petits groupes de Juifs durent recouvrir également une fonction sociale aux marges des bourgeoisies communales. L’activité de prêt sur gage devait venir en aide aux besoins des couches défavorisées de la population. L’on justifia ainsi l’établissement de Juifs dans de petites bourgades comme une mesure à l’avantage des pauvres et pour faciliter leur besoin de disposer d’argent courant[19].

Pour attirer ces intermédiaires financiers, les seigneurs locaux proposèrent des contrats spécifiques appelés condotte, qui leur assuraient la résidence ainsi qu’une série de privilèges et immunités dans le domaine religieux pendant une période généralement de dix ans. De telles ouvertures entraînèrent des vagues de migration juive de Rome et de ses environs d’abord, puis de toute l’Italie, des territoires germaniques, français et espagnols, vers les régions du centre et du nord de la péninsule[20].

Selon Michele Luzzati, la maison du banquier juif devint ainsi un carrefour d’expériences juives supra-nationales : les personnes qui habitaient sa maison étaient des marchands, des rabbins et des médecins souvent porteurs d’expériences de migrations similaires et qui montraient un niveau élevé d’instruction et une relative unité socio-économique[21]. Encadrés par les titulaires des droits de prêt sur gage, mais pas encore entièrement organisés dans des communautés, ces mondes juifs traversant l’Italie en long et en large auraient constitué, selon Luzzati, une sorte de res publica, de patrie sans territoire[22]. En fait, une grande partie de ces familles se déplaçaient de lieu en lieu avec une extrême rapidité. Des cas singuliers de multi-résidence ou de déplacements répétés d’une même personne caractérisèrent aussi cette expérience[23].

Une telle géographie mobile fut aussi alimentée et consolidée à travers des échanges matrimoniaux, qui ouvraient des perspectives extraterritoriales et des nouveaux marchés en reliant le nord, le centre et le sud de la péninsule. Ces flux migratoires juifs furent déterminés non seulement par des décrets d’expulsion, mais aussi par des politiques persécutrices de la part des souverains chrétiens ou encore par la résiliation des contrats de prêt sur gage. Des déplacements répétés furent aussi motivés par des intérêts économiques, ou justifiés suite à des échanges matrimoniaux entre familles, même très éloignées du point de vue géographique[24]. Entre la fin du Moyen Âge et le début de l’âge moderne, les flux migratoires juifs suivirent donc des trajectoires diverses et complexes, reliant le nord au sud et le sud au nord. Une telle osmose entre judaïsmes donna vie à un processus de constitution d’une koinè juive italienne, un microcosme dynamique et itinérant, embrassant toute la péninsule[25].

Ce fut ainsi une minorité prospère à l’intérieur du monde juif italien qui a alimenté de nouveaux espaces de relation avec le monde chrétien, entendus non seulement comme voies alternatives aux prédications de la séparation et de l’exclusion propagées par la religion dominante, mais aussi comme opportunités pour le développement et la vitalité d’un judaïsme reliant le nord, le centre et le sud de la péninsule. Les rapports entretenus par les membres les plus instruits du microcosme des banquiers juifs avec le monde intellectuel chrétien confirment l’existence d’échanges culturels intenses au cours de la Renaissance. Si la participation juive au sein de la haute culture italienne se révéla bien vivante, de même le monde chrétien manifesta grand intérêt pour la culture textuelle juive, vue comme légataire d’un savoir transmis à travers l’hébreu biblique[26].

Toutefois, d’un point de vue général, l’on ne peut pas partager l’image positive qui a été souvent avancée quant à la situation des relations sociales entre Juifs et chrétiens au cours de cette période. Les relations quotidiennes restèrent fortement antinomiques : de nombreux cas témoignent d’une concomitance quasiment régulière de situations extrêmement divergentes, où les scènes de la cohabitation sereine et de la familiarité la plus sincère sont traversées et dépassées par une quantité de conflits, abus et violences[27].

La large diffusion des réseaux de banquiers juifs sur les marchés financiers de l’Italie du centre et du nord fut donc un outil dans les mains des pouvoirs papaux et communaux. Si cette stratégie utilitariste permit à des groupes de marchands juifs de prendre conscience de l’unité de leurs expériences, elle contribua toutefois à propager l’image d’une présence juive contingente, synonyme d’une classe sociale liée aux pouvoirs financiers. Sur la longue durée, ces représentations stimulèrent également une vision de la relation sociale aux Juifs fondée sur des argumentations de nature spécifiquement économique. La question de l’usure des Juifs mobilisée par l’Église de la Contre-Réforme, au cœur des développements du XVIe siècle, en est l’exemple le plus éloquent.

Vers la fin du XVe siècle, la situation des Juifs en Italie fut enfin bouleversée par des grands changements démographiques et sociaux faisant suite à larrivée des réfugiés séfarades. Une nouvelle diversité commença à voir le jour parmi les populations juives du nord et du centre de la péninsule : non seulement des Juifs italiens ou dorigine ashkénaze, mais également des Juifs originaires de la péninsule ibérique.

Les ghettos italiens et la constitution de la communauté juive moderne

La création du ghetto de Venise en 1516, des ghettos de Rome et Ancône en 1555, de Florence et Sienne en 1571, mit fin au « nomadisme » des siècles précédents. Dans le contexte d’une montée des tensions antijuives, culminant dans le bûcher du Talmud à Rome et Venise (1553), le choix de l’enfermement des Juifs dans des ghettos urbains se concrétisa alors comme une solution de compromis entre les pressions plus radicales des franciscains – qui prônaient l’expulsion des Juifs – et les positions d’équilibre traditionnellement tenues par les institutions vaticanes[28].

L’historiographie italienne a consacré beaucoup d’attention aux problématiques qui furent à l’origine des ghettos, en établissant une diversification des systèmes d’enfermement selon les contextes étatiques et régionaux. Chaque situation était le reflet singulier d’une complexité de dispositifs fortement localisés, ce qui ne permettait d’établir que des connexions superficielles avec d’autres contextes semblables. Par exemple, la création du premier ghetto juif à Venise en 1516 ne trouvait pas de correspondances avec l’histoire du ghetto de Rome, réalisé en 1555. Les différences flagrantes entre les deux situations d’un point de vue temporel, ainsi que les questions politico-économiques et les tensions sociales et religieuses en jeu, étaient symptomatiques de deux phénomènes distincts[29].

Ainsi, si le ghetto de Venise se présentait comme une solution de compromis motivée principalement par des évaluations de nature économique, l’enfermement des Juifs romains reflétait une véritable idéologie d’acharnement contre la seule minorité religieuse demeurant dans l’Europe chrétienne. De même, si le ghetto des doges avait déterminé la formation d’une communauté juive à Venise – une façon de consentir à la présence en ville des prêteurs ashkénazes, puis des marchands séfarades[30] –, le ghetto des papes avait été conçu au contraire pour bouleverser l’existence d’une grande communauté juive, établie dans la ville depuis l’Antiquité. À Rome, l’enfermement était censé non seulement créer une séparation entre les Juifs et le reste de la population, en privant les premiers des droits de propriété et en les obligeant à vivre dans des conditions d’habitation et de travail pénibles, à cause de l’insalubrité des lieux, du surpeuplement et des limitations des libertés personnelles. Cette mesure de ségrégation avait été pensée surtout pour persuader les habitants du ghetto d’abandonner la religion des pères et de s’affranchir de leur captivité à travers la conversion en masse au christianisme[31].

Plus récemment, l’historien Giacomo Todeschini a cherché à établir une genèse commune aux politiques de ghettoïsation à travers une approche d’histoire économique. L’analyse des connexions entre les développements du marché du crédit et la montée des frictions antijuives entre XVe et XVIe siècles a permis de lever le voile sur des sujets moins explorés par lhistoriographie, ayant trait au processus de construction du corps communautaire catholique à lépoque de la Contre-Réforme. La genèse du ghetto a été ainsi insérée au cœur des problématiques et des tensions de la transition moderne, dans le cadre des convergences entre économie financière, religion et pouvoir, ainsi que des rapports entre oligarchies communales, couches populaires et minorités[32].

L’avènement de la banque publique et la création du ghetto résumeraient alors les effets non seulement d’une réorganisation du système du crédit et d’une longue tradition d’antijudaïsme en Italie, mais également d’une forte hiérarchisation des sociétés et d’une vaste production discursive autour des concepts de communauté, d’appartenance, de confiance, de crédibilité et de moralité économique. De ces faits, le projet d’exclusion des Juifs du corps sacré et financier de la chrétienté trouvait sa confirmation à la fois dans leur façon de vivre à l’écart des espaces de l’appartenance locale et dans leur manque de crédibilité économique[33].

Le ghetto romain servit de modèle pour tous les centres urbains italiens entre le XVIe et le XVIIIe siècle. Certaines villes daccueilcest le cas de Ferrare décrétèrent la création du ghetto un siècle après Rome. Dans le duché savoyard, le phénomène se produisit encore plus tardivement, entre la fin du XVIIe et le début du XVIIIe siècle. Ces projets dexclusion-assimilation de la minorité juive furent mis en place à travers la création de dispositifs dautogouvernement communautaire contrôlés par lÉglise et par les pouvoirs étatiques. Par exemple, selon Stefanie Siegmund, la communauté juive florentine prit son essor sous la pression des politiques fiscales de lÉtat des Médicis[34]. Conjoncturellement, la préoccupation de relier les edot ou « communautés  » (italienne, ashkénaze, levantine et portugaise) vivant dans les ghettos rendit indispensable aux yeux des Juifs la constitution d’une organisation unitaire[35].

La construction de la communauté moderne se révéla ainsi comme un fait majeur dans le processus d’acculturation des Juifs italiens aux structures politiques et aux configurations sociales de la société majoritaire[36]. Le ghetto devint alors un synonyme de communauté dans les centres du judaïsme italien qui n’avaient pas ressenti jusqu’alors la nécessité de se réunir sous un organisme centralisé. De manière paradoxale, malgré l’imposition de graves limitations à la liberté et aux activités des Juifs, la séparation leur garantissait une relative protection : elle représenta « un signe, involontaire et aberrant, de légitimation »[37].

L’exception aux ghettos fut incarnée en Italie par les villes portuaires de Livourne et Pise, qui reçurent des groupes juifs de plus en plus nombreux, sans leur infliger aucune contrainte à l’enfermement. Vers la fin du XVIe siècle, suite aux stipulations dites Livornine (1593), Pise et Livourne devinrent des centres d’attrait pour les familles séfarades fuyant les territoires de Naples et de l’État pontifical, dont de nombreux marranes qui souhaitaient revenir au judaïsme. Des nouvelles vagues de migrations se produisirent donc à cette époque, en raison des privilèges de protection, de résidence sans contraintes et de libre commerce accordés dans ces deux villes portuaires de Toscane.

Entre le XVIIe et le XVIIIe siècle, la forte croissance des réseaux marchands internationaux gérés par lélite séfarade de Livourne permit un progressif retour des Juifs vers les centres mineurs et les marchés de province, hors des ghettos urbains et des villes portuaires[38]. La faillite des ghettos en tant que dispositifs pour la séparation des communautés confessionnelles et pour la conversion en masse des Juifs au christianisme était de plus en plus flagrante.

L’émancipation en jeu : des Lumières italiennes à la violence politique

Bien que considéré unanimement comme un passage capital pour les sociétés juives italiennes, le Settecento juif n’a pas reçu beaucoup d’attention de la part des chercheurs[39]. Ceci est en partie attribuable à une certaine hésitation à reconnaître l’importance des enjeux politiques de la transition culturelle et politique initiée au cours du XVIIIe siècle. L’on peut supposer, d’une part, une volonté de dissimuler les responsabilités de l’Église romaine dans la multiplication des anti-Lumières et, d’autre part, une volonté d’omettre les fractures profondes qui ont traversé le monde juif dans le cadre du processus d’émancipation[40].

Le XVIIIe siècle fut un tournant historique fondamental dans le processus de normalisation du statut des Juifs italiens. La période des réformes éclairées, en particulier, se caractérisa par la volonté de redéfinir le rôle de la religion chrétienne dans les rapports de pouvoirs politiques, et aussi par la conception de dispositifs législatifs plus tolérants à légard de la minorité juive. Dans la plupart des états italiens, l’un des projets juridiques constitutifs du siècle comporta le règlement des conflits entre Juifs et chrétiens[41].

L’arrêt effectif de plusieurs mesures anti-juives (par exemple, l’obligation de porter un signe distinctif, l’exclusion des lieux publics ou l’interdiction d’accéder à la propriété) stimula une accélération du processus d’intégration des sujets juifs dans la sphère civique, ainsi que des parcours d’émancipation délibérés. De nombreux juifs commencèrent à repenser leur identité hors des ghettos et dans la projection d’une conciliation entre devoir civique et affiliation religieuse.

Le cas toscan est parmi les plus intéressants : ce fut en fait à partir de 1765 que le projet réformiste grand-ducal posa la première pierre d’une conception laïque de la citoyenneté pour laquelle l’appartenance confessionnelle, en l’occurrence le baptême chrétien, n’était plus une condition[42]. à Livourne, notamment, les Juifs construisirent leur voie à la citoyenneté dans une démarche d’harmonisation entre l’ancien et le nouveau, entre tradition juive et savoirs non juifs[43].

Les acquis de ce moment réformiste italien furent confirmés pendant la première période napoléonienne (1796-1799), une conjoncture caractérisée toutefois par lémergence de fortes résistances antirévolutionnaires et par l’explosion d’une violence politique profondément antijuive[44]. En tant qu’évènements ritualisés, au caractère purificatoire et punitif, les tumultes populaires de l’année 1799 reflétèrent des visions antinomiques du conflit judéo-chrétien. Reposant sur un mécanisme de persécution-protection, ils prirent la forme de réactions à la fois punitives et protectionnistes, y compris la confiscation de biens juifs comme acte de moralisation économique[45].

Les stéréotypes économiques et religieux traditionnellement attachés aux Juifs pendant l’âge moderne servirent en ce sens de base idéologique pour les insurgés de la Sainte Foi (en italien, sanfedismo). Leur représentation de la communauté majoritaire en tant que porteuse d’une moralité sacrée et de la minorité juive en tant qu’altérité subordonnée et instrument d’utilité financière justifiait à leurs yeux l’utilisation d’une violence antijuive. Vers la fin de l’ancien régime, les émeutes de 1799 donnèrent donc expression à une conception économique du ghetto juif en tant que ressource locale mise à disposition du groupe dominant[46].

Une identité juive en construction perpétuelle

L’objectif de cet article a été d’apporter un éclairage sur le processus de construction de l’identité juive dans l’Italie moderne. J’ai abordé une analyse des rapports entre présence durable des Juifs d’une part, et visions utilitaristes de la majorité chrétienne d’autre part. Au cours de l’âge moderne, l’idée des Juifs en tant que minorité « profitable » et à protéger reflétait une conception utilitariste sur le plan à la fois confessionnel, politique et économique – cela dit, autant pour la confirmation de la primauté du christianisme que pour les exigences financières des souverains.

Si, d’une part, la forte mobilité des banquiers juifs sur les marchés financiers du centre et du nord de l’Italie a contribué à diffuser l’image d’une présence juive contingente et justifiée en termes d’intérêt commercial, dautre part, l’histoire de nomadisme vécue par de nombreuses familles juives a été un élément décisif dans le processus de construction d’une identité juive unitaire.

Comme remarqué par Giacomo Todeschini, c’est à partir des concepts de moralité et crédibilité que s’est formulée l’une des questions fondamentales à l’origine de la création des ghettos du XVIe siècle. La persécution des Juifs italiens devait porter à leur conversion de masse, tandis que leur assimilation institutionnelle dans les structures des états modernes était censée mener à leur acculturation dans la société italienne.

Au cœur du XVIIIe siècle, les Juifs italiens ont entrepris leur chemin vers l’émancipation dans un souci de conciliation entre tradition et innovation, conservation et ouverture, spécificité et pluralisme culturel. Les années révolutionnaires de fin du siècle, avec ses résurgences de violence antijuive, donnent la mesure de l’impact social produit par la première émancipation juive, ainsi que de la crise d’une ancienne pratique du contrôle social : l’antijudaïsme.

En conclusion, sans vouloir diminuer les résultats de la production historiographique présentée ici, la critique formulée par Giovanni Levi en 1998 semble demeurer encore actuelle après presque vingt ans. Certainement, ses argumentations sur la perspective en histoire juive ont laissé une trace profonde dans la conscience critique et dans la réflexion des historiens des années 2000 et 2010. Sonder la perspective juive en elle-même, sans la diluer ou la forcer dans un récit historique puisé du modèle non juif, est ressenti aujourd’hui comme une démarche particulièrement nécessaire. S’il est fondamental de concevoir l’histoire des juifs dans le cadre des relations avec la majorité chrétienne et à l’intérieur des processus d’acculturation qui traversent l’espace urbain italien, il est d’autant plus indispensable de contempler les configurations sociétales et identitaires internes au groupe, ainsi que ses spécificités culturelles complexes, modelées au fil de l’histoire. Revenir aux sources juives signifie donc mesurer leur dimension sociale et politique dans le processus de construction identitaire des Juifs, leurs références culturelles ainsi que leur potentiel de création et capacité d’action.

 


[1] Anna Maria Pult Quaglia, Alessandra Veronese (dir.), Diversi angoli di visuale fra storia medievale e storia degli Ebrei. In ricordo di Michele Luzzati, Pisa, Pacini, 2016.

[2] Marina Caffiero, Storia degli ebrei nell’Italia moderna. Dal Rinascimento alla Restaurazione, Roma, Carocci, 2014.

[3] Voir les notes introductives de Francesco Spagnolo dans Tradizioni musicali degli ebrei italiani dalla Collezione Leo Levi (1954-1961), Jerusalem-Roma, Hebrew University of Jerusalem et Fondazione Accademia Nazionale di Santa Cecilia, 2001, pp. 5-12. Pour une étude d’ensemble, voir Attilio Milano, Storia degli ebrei in Italia, Torino, Einaudi, 1963.

[4] Francesca Bregoli, « Jewish Modernity in Eighteenth-Century Italy: A Historiographical Survey », Jahrbuch des Simon-Dubnow-Instituts, VI, 2007, p. 77.

[5] Giacomo Todeschini, « Fra stereotipi del tradimento e cristianizzazione incompiuta: appunti sull’identità degli ebrei d’Italia », Zakhor, VI, 2003, pp. 9-20.

[6] Giovanni Levi, « Gli ebrei in Italia. Una discussione degli Annali della Storia d’Italia Einaudi », Zakhor, II, 1998, pp. 167-168 (ma traduction).

[7] Comme le soulignent Giovanni Levi et David Bidussa, l’omniprésence du catholicisme dans la vie italienne a eu comme effet flagrant d’occulter le rôle civique joué par les minorités, laïques ou religieuses, dans l’histoire nationale. De plus, une vision standardisée des Juifs comme victimes pérennes de l’histoire aurait autorisé une certaine lecture fataliste de l’antijudaïsme de matrice religieuse, ainsi que de la persécution raciale fasciste. Voir Giovanni Levi, « Le passé incertain », dans Jean-Marc Chouraqui, Gilles Dorival, Colette Zytnicki (dir.), Enjeux d’histoire, jeux de mémoire. Les usages du passé juif, Paris, Maisonneuve et Larose, 2006, pp. 421-430 ; David Bidussa, Il mito del bravo italiano. Persistenze, caratteri e vizi di un paese antico/moderno, dalle leggi razziali all’italiano del Duemila, Milano, Il Saggiatore, 1994.

[8] L’évocation d’une Italie « havre de paix » de la cohabitation judéo-chrétienne – image pourtant lointaine de la réalité historique – est un motif central et persistant dans de nombreuses publications, soucieuses de donner des réponses rassurantes et en accord avec le sens commun du public de lecteurs auxquels elles s’adressent.

[9] Giacomo Todeschini, « Stereotipi antisemiti: il serbatoio e il ghiacciaio. A proposito di un seminario italo-francese di studi (Roma, 31 maggio-1 giugno 1997) », Zakhor, II, 1998, pp. 158-159. Plus en général sur les ambiguïtés de la vision catholique quant aux responsabilités de l’antijudaïsme, voir les réflexions de Levi, « Le passé incertain », pp. 427-430.

[10] Michele Luzzati, « Dalla Toscana a Napoli (e ritorno) alla fine del Quattrocento: note sulla koiné ebraica italiana », dans G. Rossetti et G. Vitolo (dir.), Medioevo Mezzogiorno Mediterraneo. Studi in onore di Mario Del Treppo, Napoli, Liguori, 2000, 2e vol., pp. 163-174 ; Evelyne Oliel-Grausz, « Circulations, frontières et mobilités séfarades à l’époque moderne », Cahiers du CRH, 41, 2008, pp. 31-48 ; Marina Caffiero, Storia degli ebrei nell’Italia moderna, pp. 17-21.

[11] Un exemple est constitué par les études de démographie sociale, voir Luciano Allegra (dir.), Una lunga presenza. Studi sulla popolazione ebraica italiana, Torino, Zamorani, 2009 ; Angela Groppi (dir.), Gli abitanti del ghetto di Roma, 1733, Roma, Viella, 2014 ; Michaël Gasperoni, « Les noms de familles juifs à Rome au XVIIIe siècle. Le ghetto entre onomastique et histoire sociale », Revue des études juives, 176, 2017, à paraître.

[12] Marina Caffiero, « 1789 : il “cahier des doléances” degli ebrei romani alla vigilia dell’emancipazione », dans L. Ceci, L. Demofonti (dir.), Chiesa, laicità e vita civile. Studi in onore di G. Verucci, Roma, Carocci, 2005, pp. 225-245 ; Angela Groppi, « Une ressource légale pour une pratique illégale. Les juifs et les femmes contre la corporation des tailleurs dans la Rome pontificale (XVIIe-XVIIIe siècles) », dans Renata Ago (dir.), The Value of the Norm. Legal Disputes and the Definition of Rights, Roma, Biblink, 2002, pp. 137-161 ; Davide Mano, « Plaintes juives et contentieux judéo-chrétien. Le cas de Pitigliano dans le Grand-Duché de Toscane au XVIIIe siècle (1745-1803) », L’Atelier du Centre de recherches historiques, 13, 2015, URL : https://acrh.revues.org/6588.

[13] Kenneth Stow, Theater of Acculturation: the Roman Ghetto in the Sixteenth Century, Seattle, University of Washington Press, 2001 ; Stefanie B. Siegmund, The Medici State and the Ghetto of Florence. The Construction of an Early Modern Jewish Community, Stanford, Stanford University Press, 2005 ; Bernard D. Cooperman, « Ethnicity and Institution Building among Jews in Early Modern Rome », AJS Review, 30/1, 2006, pp. 119-145.

[14] évelyne Oliel-Grausz, Relations et réseaux intercommunautaires dans la diaspora séfarade d’Occident au XVIIIe siècle, thèse de doctorat, Université Panthéon-Sorbonne, Paris, 2000 ; Lucia Frattarelli Fischer, « Reti toscane e reti internazionali degli ebrei di Livorno nel Seicento », Zakhor, 6, 2003, pp. 93-116 ; Francesca Trivellato, The Familiarity of Strangers. The Sephardic Diaspora, Livorno, and Cross-Cultural Trade in the Early Modern Period, New Haven, Yale University Press, 2009.

[15] Giacomo Todeschini, La banca e il ghetto. Una storia italiana (secoli XIV-XVI), Bari-Roma, Laterza, 2016.

[16] Michele Luzzati, « Le ricerche prosopografiche sulle famiglie ebraiche italiane (secoli XIV-XVI) », in La storia degli ebrei nell’Italia medievale: tra filologia e metodologia, Bologna, Istituto per i beni artistici, culturali e ambientali della Regione Emilia-Romagna, 1990, pp. 58-63 ; Elliot Horowitz, « Families and Their Fortunes: The Jews of Early Modern Italy », dans David Biale (dir.), Cultures of the Jews : A New History, 2002, New York, Schocken, pp. 573-636 ; Michaël Gasperoni, « La misura della dote. Alcuni riflessioni sulla storia della famiglia ebraica nello Stato della Chiesa in età moderna », dans Laura Graziani Secchieri (dir.), Vicino al focolare e oltre. Spazi pubblici e privati, fisici e virtuali della donna ebrea in Italia (secc. XV-XX), Firenze, Giuntina, 2015, pp. 175-216.

[17] Asher Salah, La République des lettres: Rabbins, écrivains et médecins juifs en Italie au XVIIIe siècle, Leiden, Brill, 2007 ; David B. Ruderman, Early Modern Jewry: A New Cultural History, Princeton, Princeton University Press, 2010 ; Francesca Bregoli, Mediterranean Enlightenment: Livornese Jews, Tuscan Culture, and Eighteenth-Century Reform, Stanford, Stanford University Press, 2014.

[18] Ariel Toaff, « “Banchieri” cristiani e “prestatori” ebrei? », dans Corrado Vivanti (ed.), Storia d’ltalia. Annali 11/1, Torino, Einaudi, 1996, p. 265-287; ID., Il vino e la carne. Una comunità ebraica nel medioevo, Bologna, Il Mulino, 1989, pp. 287-309.

[19] Corrado Vivanti, « Ebrei e storia d’Italia », dans David Bidussa, Enrica Collotti Pischel, Raffaella Scardi (dir.), Identità e Storia degli Ebrei, Franco Angeli, Milano 2000, p. 56.

[20] Michele Luzzati, « Banchi e insediamenti ebraici nell’Italia centro-settentrionale fra tardo medioevo e inizi dell’età moderna », dans Ruggiero Romano et Corrado Vivanti (ed.), Storia d’ltalia. Annali 11/1, Torino, Einaudi, 1996, pp. 175-235.

[21] Roberto Bonfil, « Lo spazio culturale degli ebrei d’Italia fra Rinascimento ed Età barocca », dans Romano et Vivanti (ed.), Storia d’ltalia. Annali 11/1, pp. 411-473.

[22] Michele Luzzati, La casa dell’ebreo. Saggi sugli Ebrei a Pisa e in Toscana nel Medioevo e nel Rinascimento, Pisa, Nistri-Lischi, 1985.

[23] Michele Luzzati, « Du “nomadisme” chez les juifs italiens à l’époque de la Renaissance : le prêt à Pontremoli et la formation d’un patronyme toponymique », Mélanges Gérard Nahon, 2012, pp. 289-308.

[24] Giacomo Todeschini, « Familles juives et chrétiennes en Italie à la fin du Moyen Age : deux modèles de développement économique », Annales. Économies, Sociétés, Civilisations, 45e année, N° 4, 1990, pp. 787-817.

[25] Cette koinè est témoignée également par une série de congrès rabbiniques tenus dans plusieurs villes italiennes du XIVe au XVIe siècle pour discuter des problèmes communs aux juifs de la péninsule, voir Louis Finkelstein, Jewish Self-Government in the Middle Ages, New York 1964, pp. 92-95, 300-307.

[26] Roberto Bonfil, Les Juifs d’Italie à l’époque de la Renaissance. Stratégies de la différence à l’aube de la modernité, Paris, L’Harmattan, 1995.

[27] Voir, par exemple, Jean-Marc Rivière, « Les juifs florentins dans l’espace politique républicain (1494- 1496) », Ebrei migranti: le voci della diaspora/ Jewish migration: voices of the Diaspora, Italianistica ultraiectina, 7, 2012, http://www.italianisticaultraiectina.org/publish/issues/7/index.html

[28] Anna Foa, « La logica del ghetto (XVI-XVII secolo) », dans Bidussa, Collotti Pischel, Scardi (dir.), Identità e Storia degli Ebrei, pp. 60-61.

[29] Sur les approches à l’histoire des ghettos italiens, cf. Anna Foa, Ebrei in Europa. Dalla Peste Nera all’emancipazione (XIV-XVIII secolo), Roma-Bari, Laterza, 1992, pp. 310-313

[30] Robert C. Davis et  Benjamin Ravid (dir.), The Jews of Early Modern Venice, Baltimore and London, The John Hopkins University Press, 2001.

[31] Anna Foa, « La logica del ghetto (XVI-XVII secolo) », p. 63 ; Caffiero, Storia degli ebrei nell’Italia moderna, pp. 95-121.

[32] Giacomo Todeschini, La banca e il ghetto.

[33] Giacomo Todeschini, Au pays des sans-nom. Gens de mauvaise vie, personnes suspectes ou ordinaires du Moyen Âge à l’époque moderne, Paris, Verdier, 2015.

[34] Stefanie B. Siegmund, The Medici State and the Ghetto of Florence. The Construction of an Early Modern Jewish Community, Stanford, Stanford University Press, 2005.

[35] David J. Malkiel, « The Ghetto Republic », dans Davis et Ravid (dir.), The Jews of Early Modern Venice, pp. 117-142 ; Serena Di Nepi, Sopravvivere al ghetto. Per una storia sociale della comunità ebraica nella Roma del Cinquecento, Roma, Viella, 2013.

[36] Kenneth Stow, Theater of Acculturation. The Roman Ghetto in the sixteenth Century, Seattle, University of Washington Press, 2001.

[37] Anna Foa, « La logica del ghetto (XVI-XVII secolo) », p. 65. (ma traduction).

[38] Lucia Frattarelli Fischer, Vivere fuori dal ghetto. Ebrei a Pisa e Livorno (secoli XVI-XVIII), Torino, Zamorani, 2008.

[39] Francesca Bregoli, « Jewish Modernity in Eighteenth-Century Italy », pp. 70-71.

[40] Marina Caffiero, « Le problème religieux », Annales historiques de la Révolution française, 334, 2003, pp. 139-154.

[41] La situation des états pontificaux, notamment de Rome, constitue un cas à part. Voir Marina Caffiero, « Tra Chiesa e Stato. Gli ebrei italiani dall’età dei Lumi agli anni della Rivoluzione », dans Ruggiero Romano et Corrado Vivanti (ed.), Storia d’ltalia. Annali 11/2, Einaudi, Torino, 1997, pp. 1 089-1 132.

[42] Davide Mano, « Plaintes juives et contentieux judéo-chrétien ».

[43] Francesca Bregoli, Mediterranean Enlightenment: Livornese Jews, Tuscan Culture, and Eighteenth-Century Reform.

[44] Paolo Bernardini, La sfida dell’uguaglianza. Gli ebrei a Mantova nell’età della rivoluzione francese, Roma, Bulzoni, 1996 ; Anna Maria Rao, « Introduction : L’expérience révolutionnaire italienne », Annales historiques de la Révolution française, 313, 1998, pp. 387-407; ID. (dir.), Folle controrivoluzionarie. Le insorgenze popolari nell’Italia giacobina e rivoluzionaria, Roma, Carocci, 1999.

[45] Marco Francesco Dolermo, La costruzione dell’odio. Ebrei, contadini e diocesi di Acqui dall’istituzione del ghetto del 1731 alle violenze del 1799 e del 1848, Torino, Zamorani, 2005.

[46] Davide Mano, I tumulti di Pitigliano nel 1799. Resistenza popolare e violenza antiebraica, thèse de doctorat, Université de Tel-Aviv, 2014.

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