Beaucoup a été écrit, en Italie comme ailleurs, sur la déportation dans les camps de concentration pendant la Seconde Guerre mondiale. D’importantes recherches ont été menées ces dernières décennies. Nous avons pu lire des réflexions essentielles et incontournables sur le sujet, telles que Les Naufragés et les rescapés de Primo Levi, et le plus récent Ce qui reste d’Auschwitz, de Giorgio Agamben[1]. Mais il y a encore du chemin à parcourir. En particulier, maintenant que la phase de rédaction des textes écrits par les témoins et rescapés peut être considérée comme terminée, il nous semble intéressant de proposer une analyse historique, stylistique et narrative du corpus disponible, qui répond à la définition, désormais acquise, de « littérature de déportation ». Ces textes hybrides et variés, se situant en effet au carrefour de plusieurs genres (chroniques d’emprisonnement, journaux de guerre, autobiographies, essais philosophiques sur la nature humaine, pamphlets politiques, comptes rendus scientifiques et historiques, parmi d’autres), présentent en effet un grand intérêt. Nous proposons ici une lecture d’un corpus assez homogène : quinze livres, quinze témoignages écrits par les rescapés italiens du camp de concentration de Flossenbürg.
La déportation des Italiens et Flossenbürg
La déportation vers le camp de concentration des opposants au régime fasciste italien commence plus tard qu’ailleurs et concerne un nombre plus réduit par rapport à celui d’autres États européens. Cela s’explique par un décalage historique, l’Italie ayant signé l’armistice avec les forces alliées en septembre 1943, et par la situation socio-historique du pays, où les gendarmes fascistes s’étaient acharnés sur les opposants dès les années 1920, avec leurs méthodes bien connues : exil intra-national (confino), interrogatoires musclés, incarcération, prisons de sécurité sur les îles, exécutions arbitraires des militants et fusillades constituent la triste séquence de sévices et de meurtres qui caractérisent cette période noire de l’histoire italienne. Le décalage concerne également les lois raciales, hypocritement appelées Lois pour la protection de la race, qui visent la communauté juive italienne, promulguées à partir de 1938. Tout cela explique pourquoi la déportation en masse des Italiens vers les camps nazis ne commence qu’en septembre 1943[2]. Avec l’armistice signé par le général Badoglio le 8 septembre 1943, en effet, la situation a basculé, l’Italie du centre-nord se trouvant sous la domination directe du régime national-socialiste allemand, allié à la République sociale italienne qu’il a remise en place après la chute du régime fasciste. L’Italie, ancienne alliée, subit ainsi la politique de la terreur et la stratégie de la déportation au même titre que les pays envahis. Comme pour les autres populations victimes de l’organisation criminelle concentrationnaire, les Italiens frappés par la déportation sont les Juifs, les opposants politiques, les membres de la résistance armée, ainsi que tout groupe considéré comme désagréable et suspect au régime. Tout cela est tristement connu. Ce qui est plus spécifique à la réalité italienne, c’est que la plupart des déportés étaient rassemblés d’abord dans le camp de Bolzano, stratégiquement situé dans le Tyrol du Sud, près du Brenner, ici enfermés dans les wagons et transportés, dans les conditions misérables que l’on connaît, vers les camps au-delà des Alpes. Hormis quelques centaines de personnes provenant d’autres villes et d’autres camps italiens (rappelons notamment la Risiera di San Sabba, à Trieste, et le camp de Fossoli, près de Carpi), toutes les victimes de la déportation nazie ont suivi ce parcours ferroviaire, reconstruit dans le détail par le travail de Dario Venegoni[3].
Grâce aux recherches minutieuses d’Italo Tibaldi[4], ancien déporté lui-même, qui a consacré toute sa vie à la reconstruction des faits et à la rédaction des listes des déportés. Nous savons aujourd’hui que 123 convois sont partis de l’Italie vers les camps nazis : les destinations principales étaient Auschwitz, Buchenwald, Mauthausen et Dachau. Moins fréquemment apparaissent dans les listes italiennes les destinations de Ravensbrück, Flossenbürg, Bergen Belsen. Les études approfondies de Liliana Picciotto Fargian, en collaboration avec le Centre de documentation juive contemporaine, permettent de suivre les traces de la communauté juive italienne, déportée et massacrée dans les camps d’extermination[5]. Je ne peux que renvoyer à ces travaux scientifiques pour les informations détaillées sur le phénomène socio-historique de la déportation en masse des Italiens, dont le nombre total de victimes s’élèverait à environ 43 600 personnes (hommes, femmes, enfants) : 30 000 opposants politiques, résistants au régime ou travailleurs en grève, 8 600 Italiens d’origine juive, et 5 000 militaires de l’armée italienne, mieux connus comme les IMI (Italienische Militär-Internierte), internés dans des camps à part, car considérés comme déserteurs par la Wehrmacht[6].
Nous allons traiter ici, plus particulièrement, le cas du camp de Flossenbürg où, selon nos sources, 3 020 Italiens (2 678 hommes et 342 femmes) ont été déportés entre 1944 et 1945. Parmi les rares rescapés de ce camp, quinze personnes ont écrit et publié un témoignage, ce qui constitue un petit corpus homogène de textes, intéressants à analyser dans une perspective comparée. Ces récits, au carrefour entre le compte rendu historique, le journal et l’autobiographie, ne sont pas des cas isolés, bien au contraire. D’autres récits de déportation en langue italienne constituent des textes fondateurs, points de repères incontournables d’une véritable littérature de déportation : non seulement ceux de Primo Levi, universellement connus comme représentants majeurs de la littérature de déportation et de la réflexion générale sur les camps[7], mais aussi ceux de Piero Caleffi, Lidia Beccaria Rolfi, parmi d’autres, portant plus spécifiquement sur la déportation politique italienne[8]. Le camp de Flossenbürg étant destiné principalement aux prisonniers politiques (et en moindre partie aux Juifs), les textes de notre corpus relatent surtout cette expérience d’emprisonnement : sur quinze témoins-rescapés, quatorze étaient des triangles rouges (dont treize hommes et une femme) et une seule d’origine juive.
Le camp de Flossenbürg est situé dans la Bavière nord-orientale, à environ 170 km de Dachau. C’est à partir de ce dernier, en effet, que les premiers Häftlinge ont été transférés à Flossenbürg en 1938, afin d’y construire les structures du camp et de travailler à la carrière qui en avait motivé la construction[9]. Les pierres étaient censées servir au renouvellement architectural de la ville wagnérienne de Bayreuth, très chère au régime, et le camp avait comme but initial l’exploitation intensive de cette carrière. Au fil des années, le camp se transforma en camp d’extermination par le travail, avec l’arrivée des prisonniers étrangers : d’abord les Russes, déportés par milliers, suivis par les autres, Polonais, Français, Belges, Italiens, etc. Le taux de mortalité grimpa de plus en plus. Parmi les plus fréquentes causes de mort (que le registre du camp ne nomme pas), il y eut la famine, l’épuisement au travail, l’assassinat par les coups et les sévices, les exécutions par pendaison ou fusillade, les maladies et les épidémies de toutes sortes, dont le typhus et la dysenterie. De nombreux malades, enfin, ont péri à cause d’injections létales administrées dans le Revier, le soi-disant hôpital du camp, ou après l’enfermement pur et simple dans le block des agonisants, où on les laissait mourir. Le camp fut doté assez tôt d’un crématoire, un seul, mais entouré de bûchers et de fosses communes lorsqu’il devint impossible d’y détruire les corps de plus en plus nombreux. Ce sont là des aspects communs à tout l’univers concentrationnaire, hélas, et qu’on peut aussi constater dans la réalité historique de Flossenbürg de 1942 à 1945. Bien décrits dans les témoignages écrits et oraux des rescapés[10], ils sont encore en partie perceptibles dans la visite du mémorial et du musée aujourd’hui.
Deux sont les particularités de Flossenbürg, par rapport à d’autres camps de prisonniers politiques sans doute plus connus du grand public (Buchenwald, Mauthausen, Dachau et Ravensbrück, pour ne citer que ceux qui ont engendré une littérature de déportation très riche, et en plusieurs langues). Premièrement, le camp était entre les mains d’une hiérarchie interne constituée presque exclusivement par des prisonniers de droit commun, criminels violents et dangereux, souvent de langue allemande mais également d’autres nationalités. Ceux-ci s’acharnaient sur les opposants politiques en toute impunité, en abusant de leur pouvoir avec des excès de violences meurtrières, pour se faire remarquer par les SS et obtenir des privilèges. Deuxièmement, le camp de Flossenbürg était morcelé en un camp central (Hauptlager) et en un nombre important de sous-camps ou camps satellites, presque quatre-vingts au moment culminant de la guerre. Ces sous-camps étaient éparpillés dans toute l’Allemagne orientale, jusqu’à Dresde et Berlin. Ils étaient de dimensions très variées et duraient plus ou moins longtemps, selon leur fonction ; par exemple, certains Kommandos plus stables étaient assignés à des usines, tandis que d’autres avaient le but temporaire de dégager les villes bombardées et les chemins de fer allemands.
Bon nombre d’opposants politiques italiens ont donc été déportés à Flossenbürg à partir de 1944. Arrivés dans le Hauptlager, la plupart passaient par l’atroce procédure d’immatriculation dont les témoins gardent le souvenir à jamais : les coups donnés dans les couloirs par les Kapos armés de gummi (la matraque enrobée de gomme), la torture des douches froides et chaudes, l’attente interminable sur la place d’Appel où les prisonniers étaient exposés sans défense à l’hiver de Flossenbürg, extrêmement rigoureux. Après la période dite de quarantaine, qui les livrait déjà aux conditions misérables de survie, ils étaient regroupés en Kommandos et transférés dans d’autres camps, afin d’y accomplir le travail d’esclavage qui leur était attribué : la construction d’avions Messerschmitt dans le camp de Saal an der Donau, le creusement de tunnels souterrains dans celui d’Hersbruck, le travail à la chaîne pour AutoUnion, Audi et Horch à Zwickau, ou encore l’industrie d’armements Astra-Werke dans le camp féminin de Chemnitz. En avril 1945, ceux et celles qui avaient résisté jusque-là ont été intégrés, dans des conditions misérables, aux marches de la mort qui, en suivant des périples aussi absurdes qu’interminables, ont laissé leur sillon de cadavres au travers de l’Europe.
D’après des recherches minutieuses, il est possible d’affirmer aujourd’hui que, sur les 3 020 citoyens italiens déportés à Flossenbürg, seulement 170 personnes ont survécu et sont rentrés en Italie pendant l’été 1945. Comme tous les autres rescapés des camps, ils ont encore dû lutter contre les obstacles physiques et psychologiques, assumer la guérison des blessures, la réintégration sociale et professionnelle, la reconnaissance officielle des souffrances endurées, la gestion de la mémoire et la nécessité impérieuse de témoigner. Cette dernière les a souvent poussés à participer aux activités d’intérêt public, telles que les conférences scolaires, les entretiens pour la presse, l’enregistrement de bandes sonores, les voyages ou pèlerinages dans les camps et, pour certains, l’écriture du témoignage.
Nos quinze témoins n’ont pas écrit tous en même temps. Les premiers, Pino Da Prati et Frida Misul, l’ont fait dès leur retour, en 1946[11]. Les derniers, Elvia Bergamasco et Attilio Armando, avaient attendu plusieurs décennies avant d’écrire leurs livres, publiés respectivement en 2005 et 2006, peu avant leur mort[12]. Si la date de publication est la première différence remarquable, elle n’est pas la seule pour autant. D’autres apparaissent petit à petit, après une lecture plus attentive de ces textes : la durée de la période narrée, les choix stylistiques, l’importance donnée à certains épisodes plutôt qu’à d’autres, l’impact de l’autobiographie, la présence éventuelle d’un discours politique ou religieux, l’influence d’autres auteurs ou d’autres initiatives. L’identité de ces quinze témoins, très hétérogène aussi, permet de les considérer comme un bon échantillon des déportés politiques italiens : Pino Da Prati était un ancien militaire entré dans les rangs de la résistance armée, tout comme Sergio Rusich de’ Moscati et Italo Geloni ; Armando Attilio et Gianfranco Mariconti, des maquisards qui ont échappé par miracle à l’exécution capitale ; Gaetano Cantaluppi est un général de l’armée italienne passé également à la résistance, Giannantonio Agosti un moine franciscain, confesseur polyglotte qui avait aidé des familles juives, Goffredo Ponzuoli un objecteur de conscience emprisonné par les fascistes, Elvia Bergamasco et Antonio Scollo des adolescents actifs dans la résistance, Frida Misul une jeune fille juive ayant un cousin maquisard, Pietro Pascoli, Vittore Bocchetta, Franco Varini et Sergio Sarri des antifascistes depuis toujours, qui avaient mené une lutte d’abord personnelle, puis organisée, contre les forces nazi-fascistes[13].
C’est par le biais de leurs témoignages (en traduisant certains passages en français) que je vais aborder une thématique chère à tous, sans distinction, et qui ressort constamment au fil des pages : celle de l’identité italienne, avec ses avantages et ses inconvénients. Le sens d’appartenance à un univers géographique, culturel, linguistique, et même socio-historique précis, les réunit et les distingue nettement des autres, en traçant les contours d’une identité rassurante et douloureuse à la fois.
La violence et le mépris contre les Italiens
Les témoins de Flossenbürg relatent toutes les souffrances endurées de la part des Kapos triangles verts, dont certaines provoquées par un véritable mépris, une méfiance explicite à l’égard des prisonniers politiques italiens. Les Italiens ne sont pas les seuls à subir ces formes de racisme, qui ne font qu’aggraver la situation déjà précaire et périlleuse de chaque Häftling, à la merci de son bourreau. De surcroît, les Italiens sont considérés comme des traîtres en Allemagne, après les événements historiques de 1943, insultés et ridiculisés pour cela :
« Pendant notre marche de transfert, de la gare au camp, nous traversâmes un village où des femmes et des enfants nous approchaient, nous crachaient dessus, nous frappaient en criant : "Badoglio, bandits, traîtres". […] Le soir, en attendant d’être à nouveau comptés, nous entendîmes dire plusieurs fois : "Italien merde, bandits, maccaroni". En écoutant ces mots, je me mis à pleurer. Pourquoi nous haïssaient-ils ? De quelle faute étions-nous coupables ? » [14]
Les prisonniers italiens étaient insultés et méprisés en tant que traîtres par les Allemands, aussi bien les militaires que les civils. Mais ce n’est pas tout. En tant qu'alliés du régime national-socialiste avant l’armistice, et l’étant encore, quoique partiellement, avec la République de Salo, les Italiens étaient considérés comme des ennemis jurés par les autres prisonniers politiques de toute origine, accusés d’être des fascistes et des partisans de Mussolini. Ce paradoxe historique est sans doute apparu comme l’injustice la plus insupportable pour ces antifascistes de première heure, qui avaient lutté contre le régime et devaient justement à cette opposition active et consciente leur arrestation et leur déportation. Les prisonniers politiques italiens se trouvaient entre le marteau et l’enclume : « Je compris alors la raison de cette haine. J’étais entre deux ennemis, les Allemands d’un côté, les codétenus de l’autre »[15].
Les Italiens, comme les autres Häftlinge, sont livrés à la violence furieuse et délirante des Kapos. Mais en plus, ils doivent subir les insultes et les préjugés de ceux-ci, en devenant victimes d’une véritable haine sadique. Le témoignage de Frida Misul, internée dans le sous-camp de Wilischtal, nous en fournit un exemple bien concret :
« Pendant que je m’approchais de la gamelle, la Kapo me regarda droit dans les yeux et me dit : "Du Italien", et moi, un grand sourire aux lèvres, je lui répondis que oui.
à cette réponse elle me donna un coup de bâton, en me disant qu’il n’existait aucun supplément pour les Italiens, car nous étions considérés comme des lâches et des traîtres. Un nœud me serra la gorge et je commençai à pleurer, cette maudite Kapo me prit alors par le bras et me traîna dans le Block, où mes amies se trouvaient, puis elle appela deux Allemandes et me fit donner une raclée jusqu’au sang. Lorsqu’elles virent que j’étais sans forces, elles me demandèrent si j’avais encore faim, ensuite elles me laissèrent là, par terre, le sang qui coulait de mon nez et de mon oreille. Mes chères amies vinrent aussitôt me prêter leur aide, en essayant de me redonner des forces et, par de bonnes paroles, de me réconforter, en me disant de supporter avec résignation toutes les insultes qui nous étaient faites, sans défense possible »[16].
On constate bien, ici, comment l’explosion de colère de la Kapo est motivée par l’origine de la prisonnière. Notons que Frida ne se rend pas compte à temps du danger, en répondant affirmativement à la question, « un grand sourire aux lèvres ». Son bonheur naïf se retourne contre elle, en provoquant l’expérience traumatique des coups et des insultes. Ainsi la jeune prisonnière comprend à son détriment que le fait d’être italienne est un inconvénient majeur, une faiblesse qui comporte un danger supplémentaire à éviter à tout prix. Désormais, elle essayera de dissimuler son origine, afin de prévenir et d’éviter la colère des bourreaux.
Les injustices provoquées par l’identité italienne dans les camps constituent un sujet récurrent de ces témoignages. Les témoins décrivent et résument souvent des épisodes de violence explosive subis à la première personne ou observés sur des camarades[17]. Les bourreaux expriment leur mépris des Italiens, tantôt par des insultes, tantôt par des coups, plus souvent par les deux. Le témoin rappelle parfois la situation générale sans citer les mots précis : « Le visage altéré, il maudit tous les Italiens et moi, en criant une avalanche d’injures »[18]. Bien plus souvent, l’insulte reste gravée dans la mémoire et ressurgit au moment de l’écriture, encore imprégnée de toute sa haine et puissance de mortification. Les figures qui crient et crachent ces insultes, quant à elles, sont comme figées, immortalisées pour toujours dans cette pose injurieuse : ainsi, les vieux et les enfants à la gare, criant sur les Italiens qui descendent du wagon « Italienischen, Makkaroni » et « Badoglio », d’un « regard froid, dépourvu d’humanité »[19]; la femme allemande, ouvrière civile de l’usine où les prisonniers travaillent en esclavage qui leur crache au visage « Italien alles Scheisse »[20] ; ou encore le Kapo sadique qui réserve au « bandit italien » vingt-cinq coups de matraque chaque premier lundi du mois[21] ; l’autre Kapo qui refuse plusieurs fois la soupe au prisonnier italien, le laissant à jeun, avec la simple explication « Hunde Italiener, wegg »[22]. Comble de cette triste série d’épisodes en crescendo, rappelons la scène atroce décrite et rapportée par Da Prati : un assassin lâche les chiens enragés contre un Italien qui s’est écroulé par terre, en criant « Jule Italien. Caput ! »[23] En corrigeant « Jule » par « Jude » (Juif), on peut affirmer que l’insulte antisémite se mêle ici au racisme à l'égard des Italiens, cibles de la colère et du mépris des puissants.
Si la rage violente des Kapos est un danger constant auquel les prisonniers apprennent à échapper, l’autre forme d’insultes, à laquelle on faisait allusion plus haut, provoque une blessure bien plus cuisante : d’être appelé « fasciste » par les camarades étrangers. Le prisonnier politique italien ressent immédiatement l’exigence de se justifier, de s’expliquer : malgré les obstacles linguistiques, il veut raconter son appartenance au réseau de la Résistance, son opposition au fascisme. Tout ce qu’il souhaite, c’est d’être comme les autres car, s’il partage avec les camarades l’emprisonnement dans le camp, il partage aussi les choix politiques qui l’y ont emmené :
« Nous portions l’uniforme comme eux tout en étant des traîtres. […] Quand je me rendis compte qu’il y avait des Français parmi eux qui comprenaient ma langue, je me calmai un peu et tâchai de leur faire entendre que j’étais moi aussi l’un des leurs, condamné en tant qu’antifasciste. Ils auraient compris et peut-être serions-nous devenus comme des frères »[24].
Dans leur effort pour surmonter la méfiance et le mépris que les camarades leur témoignent, afin de se faire reconnaître comme des triangles rouges – puisque la marque sur la veste ne suffit apparemment pas – les prisonniers Italiens utilisent tous les moyens à leur disposition. Ainsi le jeune Scollo, interné dans la baraque 19 des mineurs et traité de « Badoglio Macaroni » dès son arrivée, bousculé et maltraité, résume bien la situation paradoxale : « nous récoltions – sans en être coupables – l’héritage de haine que le fascisme avait mérité, car c’est avec cela qu’on nous identifiait, en tant qu’Italiens »[25]. Chacun trouve un moyen de s’expliquer : Ponzuoli, on l’a vu, s’adresse aux seuls camarades en mesure de le comprendre, les Français ; Scollo s’exprime par le biais de la musique, un langage universel que tous peuvent comprendre. C’est le chant des partisans Fischia il vento (Le vent siffle) qui lui permet de proclamer son identité.
« Pour les déportés des autres pays ce fut une grande surprise : c’était la première fois qu’ils entendaient une chanson de partisans italiens. […] Je compris que mes amis gagnaient du courage, de la dignité : la chanson contenait le motif de notre déportation ainsi que nos espoirs. Je n’avais pas une belle voix, mais je chantais, par défi, à tue-tête. […] Fischia il vento était notre revanche, notre force, notre honneur. De moins en moins de déportés nous appelaient avec mépris “fasciste” et “Mussolini”, des mots profondément humiliants pour nous, conscients de ne pas les mériter. Désormais ils ne nous frappaient plus autant que les premiers jours ; on s’était fait quelques amis »[26].
Force est de constater, en lisant ces textes, que la Résistance italienne n’était guère connue au-delà des Alpes, où l’idée d’une Italie fasciste compacte prédominait. Les efforts pour se justifier auprès des camarades, leur faire découvrir la résistance italienne méconnue, s’ajoutaient aux autres innombrables obstacles et problèmes, d’autant plus que très peu de prisonniers italiens maîtrisaient l’allemand – l’allemand hybride du camp – et qu’ils devaient se faire comprendre autrement.
« Mais les Italiens, rescapés des camps nazis, se rappellent avec une amertume infinie les humiliations, les insultes, les mauvais traitements dont ils étaient la cible de la part des camarades d’autres nationalités, ce qui nous rendait la vie à l’intérieur des barbelés encore plus dure et mortifiante »[27].
Le sujet est omniprésent dans les récits des témoins, si bien que sa fréquence suffirait à montrer à quel point ce problème leur tenait à cœur. Cela ne suffit pas encore : après avoir décrit l’injustice à plusieurs reprises et en avoir fourni de nombreux exemples, le témoin Pascoli entame une défense collective dans son récit et répond à ces accusations une fois pour toutes, quinze ans après les faits[28].
L’Italie de la nostalgie et de l’espoir
Heureusement, l’identité italienne ne constitue pas dans ces textes uniquement un sujet négatif, lié au souvenir douloureux des insultes et des coups. Par moments, le sentiment d’appartenance à une entité géographique différente et lointaine du camp peut susciter une profonde nostalgie et même un certain orgueil, pour tous les déportés, y compris les Italiens. Il ne s’agit pas du patriotisme ou du nationalisme de propagande, loin de là ; plutôt d’un sentiment d’amour pour le pays d’origine idéal, irréel et utopique, presque insaisissable. Dans les rares moments de répit, les prisonniers échangent leurs souvenirs et leurs projets. Ces conversations désespérées contribuent à dresser un portrait idéalisé de l’Italie, dont les témoignages font état malgré l’écart temporel qui les sépare de leur ancien état d’esprit. Vue par les yeux des prisonniers de Flossenbürg, l’Italie ressemble au paradis sur Terre, un éden qui, malgré son apparence presque onirique, parvient à raviver l’espoir du retour. Peu importe que les souffrances de l’individu aient commencé là-bas : l’Italie devient pour lui l’antithèse du camp de concentration.
Puisque ce n’est qu’avec les compatriotes qu’on peut parler la langue commune, et qu’ils sont les mieux placés pour partager la soif de souvenirs heureux et de rêves de retour, les Italiens essaient de se réunir le plus souvent possible. Bien entendu, ce phénomène de cohésion concerne chaque communauté du camp[29]. Dans les témoignages, les preuves de ce sentiment rassurant d’appartenance sont nombreuses : les prisonniers restent ensemble dans la mesure du possible, se donnent la main, se soutiennent lors de l’appel ou des marches épuisantes, s’aident mutuellement après les punitions et les coups, bref, ils se manifestent les seules formes de solidarité possible dans le camp, où chacun lutte pour assurer sa survie. Da Prati décrit par exemple l’habitude apaisante qui consiste à répéter les noms – et non les numéros de matricule – des camarades, afin de leur rendre, ne fût-ce qu’un instant, une identité humaine : « s’appelant par leur prénom, sans rien dire d’autre, les déportés se sentent proches, moins malheureux et ancrés à un mince fil, qui est la douleur commune et la peine identique »[30].
Toute séparation des camarades est perçue comme un malheur incommensurable : Bocchetta mentionne les multiples efforts pour rester avec ses camarades. Leurs noms, d’ailleurs, sont constamment répétés dans le texte, comme si la cohésion du petit groupe s’était conservée au-delà du temps, pour ressurgir dans les pages du livre[31] ; Ponzuoli, quant à lui, rappelle un moment d’angoisse et de panique, lorsqu’il a été sélectionné pour un transport, séparé des autres, sans même que ses camarades sachent où il allait[32].
Si les souvenirs et les rêves individuels ne servent pas à grand-chose, dans ce contexte, ils acquièrent tout leur sens dans un échange avec un camarade du même pays. Le simple fait d’en parler est important. C’est là toute la question. Grâce à l’autre, les souvenirs d’un bonheur passé remontent, tout comme renaissent les espoirs d’un retour à la vie :
« Toutefois, lorsque, sur la plaine infâme ou dans l’odeur du crématoire, je me retrouve avec les vieux amis, je redeviens moi-même, si bien que je peux à nouveau parler de demain, et de fuite, et des colis d’Italie ou de la Croix rouge, et de nourriture sur une nappe blanche avec les mains de l’épouse, de la fille, de la mère, de petits fours au café, du lait au matin et d’un verre de vin. De vin : moi, qui ne bois pas et qui déteste l’alcool ; moi, j’ai envie d’un verre de vin et je me souviens de son parfum comme un alcoolique »[33].
Comme cet extrait le montre bien, la conversation avec l’ami n’est pas seulement agréable et thérapeutique. Elle permet la connexion avec un passé commun ou similaire, une vie antérieure qui a été interrompue mais qui pourrait un jour reprendre. Elle redonne au déporté son identité, d’Italien d’abord mais, surtout, d’être humain. Elle fait naître l’espoir de résister, de ne pas se laisser aller, véritable formule de survie dans les misérables conditions physiques et psychiques dans lesquelles ces prisonniers se trouvaient. C’est dans ce sens que Bocchetta définit la simple rencontre d’un ami qu’il croyait perdu comme « une fenêtre sur la vie »[34].
De longues conversations entre camarades de déportation, si vivifiantes, si indispensables, sont remémorées par tous les témoins. Les discours portent sur l’Italie dans ses multiples facettes. D’abord sa gastronomie, priorité absolue dans les conversations des déportés affamés qui passent des heures à décrire les recettes de leur mère ou les produits typiques et régionaux, dont chaque détenu s’efforce de décrire le goût et la texture aux camarades des autres régions. Ensuite, il est question de musique (les hymnes, les chansons, l’opéra), de littérature (les poètes italiens cités par cœur, les extraits littéraires mieux connus, Dante, Pellico et Manzoni et tout écrit qui ait un rapport avec la situation actuelle). Il est encore question de religion, de politique, de géographie. Les exemples sont innombrables, mais un épisode revient dans plusieurs témoignages : le moment où des prisonniers italiens, enfermés dans un wagon à bétail, chantent ensemble.
« Au même instant, du fond du wagon, j’entendis un chant étouffé qui se fit de plus en plus puissant : Teresio Olivelli, Croix de la valeur militaire pour la Résistance, mort assassiné par les SS dans le camp d’Hersbruck, avait lancé son défi : c’était l’air de Va pensiero sull’Ali Dorate. Nous chantâmes tous sans exception, et même ceux qui ne connaissaient pas le chœur émouvant de Nabucco de Verdi, au moment de dire "O Mia Patria si Bella e Perduta” crièrent avec nous "O Mia Patria si Bella e Vittoriosa” »[35].
Le chœur des Hébreux Va’ pensiero n’est pas seulement l’hymne le plus populaire pour les Italiens (du Risorgimento à nos jours) mais aussi un célèbre chant de l’exil et de déportation, où les prisonniers de 1944 s’identifient au peuple juif en Babylone. Tous les prisonniers dans le wagon chantent à l’unisson, guidés par l’élan passionné d’Olivelli, personnage charismatique et extraordinaire que tous les témoins de Flossenbürg ont décrit avec admiration et respect, et ainsi sauvé de l’oubli.
Le chant Va’ pensiero atteste l’importance de l’identité italienne dont il est question ici, mais aussi celle de la musique, force d’agrégation et d’expression fondamentale dans les camps. Les deux aspects ne s’excluent pas, bien au contraire : ils se réunissent dans cette expérience à la fois musicale, linguistique et remémorative.
« On chante. Cinquante voix chantent le chœur de Nabucco, qui est un rappel nostalgique de notre terre lointaine : Va, pensiero sull’ali dorate. Les hommes d’escorte nous regardent admiratifs. Beaucoup des nôtres ont les larmes aux yeux »[36].
La musique éveille un sentiment de nostalgie pour l’Italie. Les hommes, émus, y reconnaissent un fragment de leur passé, de leur histoire, de leur identité. Certes, la nostalgie n’a pas toujours une valeur constructive car elle peut creuser le chagrin et dévoiler l’abyme. Il arrive que la musique dans le camp soit perçue comme un motif de désespoir justement parce qu’elle découvre l’ampleur de la chute du monde civil et culturel à l’enfer primordial du camp. Le témoin Sarri, par exemple, relate un épisode antithétique où les déportés, convoqués par le Kapo pour écouter le concert d’un chanteur, ne supportent pas le réveil de sentiments nouveaux, refoulés, ingérables, et sont encore plus abattus. Voici la réflexion finale du témoin :
« Le chant dans les camps : impossible si l’on veut exprimer la joie, précieux et interdit pour donner de la force, cruel s’il donne l’ampleur de l’écart avec cette période révolue qu’on s’efforce de rappeler »[37].
Ni la pratique inhabituelle de la musique ni la nostalgie du pays ne donnent de la joie dans les camps. La joie y est tout simplement bannie. Toutefois, les deux peuvent toucher le prisonnier et éveiller son identité qui semblait perdue à jamais. Agosti, le religieux du groupe, décrit l’apparition soudaine d’un état d’esprit analogue. Tout en étant déclenchée par une perception auditive bien différente (le son des cloches), la réaction émotionnelle est identique :
« Resté à l’usine sans camarade […], même isolé, puis-je dire, des autres Italiens de la même baraque car chacun devait penser à soi, je fus saisi par une grande mélancolie. Je me souviens qu’un soir, en entendant sonner les cloches de Zwickau – un concert qui semblait être celui d’une orgue magnifique – j’aperçus que j’avais les larmes aux yeux. "C’était l’heure qui tourne le désir…" Quelle tristesse ! Quelle nostalgie !… Et je me mis à prier. »[38]
Cet extrait condense en quelques lignes tous les éléments dont il a été question ici. La solitude due à la séparation des camarades, la mélancolie, la nostalgie suscitée par les cloches d’abord, par le souvenir de l’orgue ensuite, amplifiée ultérieurement par le biais de la citation de Dante facilement reconnaissable. La prière finale peut donner un peu de réconfort à Agosti, bien que son habit n’ait pas suffi à lui éviter les souffrances endurées dans le camp. Avant d’être transféré à Dachau dans la baraque des prêtres, il a en effet partagé la vie et les conditions des autres prisonniers politiques italiens.
Pour conclure, l’identité italienne des témoins imprègne leurs récits en constituant un fil conducteur, qui relie les diverses expériences entre elles, à partir du voyage dans le wagon, en passant par la découverte traumatique de l’univers concentrationnaire, puis en décrivant les moments saillants de la détention, pour arriver jusqu’à la marche de la mort et – pour ceux qui le racontent – au rapatriement et à la vie après Flossenbürg. Dans tous les témoignages relatifs à l'épisode de la déportation, le sujet est abordé : chaque page porte la marque de cette identité italienne que les déportés de Flossenbürg subissent, vivent et acceptent, et qu’ils redécouvrent bien plus tard, au moment d’écrire leur témoignage, comme étant un élément incontournable de leur expérience concentrationnaire.
[1] Primo Levi, Les Naufragés et les rescapés. Quarante ans après Auschwitz (1986), trad. André Maugé, Paris, Gallimard, 1989; Giorgio Agamben, Ce qui reste d’Auschwitz, trad. Pierre Alferi, Paris, Payot et Rivages, 1999.
[2] Le premier convoi est parti le 16 septembre 1943, en direction d’Auschwitz. Voir Italo Tibaldi, Compagni di viaggio. Dall’Italia ai Lager nazisti. I “trasporti” dei deportati (1943-1945), Milano, Franco Angeli, 1994, p. 31.
[3] Dario Venegoni, Uomini, donne e bambini nel Lager di Bolzano. Una tragedia italiana in 7.982 storie individuali, Milano, Hoepli, 2005.
[4] Italo Tibaldi, Compagni di viaggio, op. cit.
[5] Liliana Picciotto Fargian, Il libro della memoria (1991), Milano, Mursia, 2001.
[6] Source ANED. Voir aussi Italo Tibaldi, Compagni di viaggio, op. cit., pp. 24-26 ; Romano Battaglia, Storia della Resistenza Italiana, Torino, Einaudi, 1964 ; Paul Ginsborg, Storia dell’Italia 1943-1996, Torino, Einaudi, 1998, p. 80 ; Giuseppe Mayda, Storia della deportazione dall’Italia 1943-1945. Militari, ebrei e politici nei lager nazisti, Torino, Bollati Boringhieri, 2002.
[7] Primo Levi, Opere, sous la direction de Marco Belpoliti, Torino, Einaudi, 1997, vol. I et II.
[8] Piero Caleffi, Si fa presto a dire fame, Milano, Mursia, 1968 ; Lidia Beccaria Rolfi, L’esile filo della memoria. Ravensbrück, 1945 : un drammatico ritorno alla libertà, Torino, Einaudi, 1996. Voir aussi : Liana Millu, Il fumo di Birkenau (1947), Firenze, Giuntina, 1986 ; Luciana Nissim Momigliano, Ricordi della casa dei morti (1946), in Ricordi della casa dei morti e altri scritti, sous la direction d’Alessandra Chiappano, Firenze, Giuntina, 2008 ; Vincenzo Pappalettera, Tu passerai per il camino. Vita e more a Mauthausen, Milano, Mursia, 1965, et, du même auteur, Nei lager c’ero anch’io, Milano, Mursia, 1973.
[9] De plus amples informations sur le camp de Flossenbürg se trouvent dans Jörg Skriebeleit, Erinnerungsort Flossenbürg, Akteure, Zesuren, Geschichtsbilder, Göttingen, Wallstein, 2009.
[10] Plusieurs rescapés d’autres pays ont écrit des récits autobiographiques sur le camp de Flossenbürg. Rappelons notamment : Léon Calembert, Au camp de Flossenbürg (1945), Bruxelles, Académie royale de Belgique, 1995 ; Heinz Heger, Die Männer mit dem Rosa Winkel. Der Bericht eines Homosexuellen über seine KZ-. Haft von 1939-1945, Hamburg, Merlin, 2001 ; Karl Schrade, Elf Jahre. Ein Bericht aus deutschen Kontentrationslagern, Göttingen, Wallstein, 2014.
[11] Pino Da Prati, Il triangolo rosso del deportato politico n. 6017, Milano, Gastaldi, 1946; pour Frida Misul, il s’agit de la première version de son témoignage: Fra gli artigli del mostro nazista, la più romanzesca delle realtà, il più realistico dei romanzi, Livorno, Stabilimento Poligrafico Belforte, 1946. Dans cet article, on fera allusion à la deuxième version, plus riche, de ce témoignage : Deportazione: il mio diario, Livorno, Benvenuti & Cavaciocchi, 1980.
[12] Elvia Bergamasco, Il cielo di cenere, sous la direction d’I. R. Pellegrini et U. Perissinotto, Portogruaro (Ve), Nuova dimensione, 2005 ; Attilio Armando, Dalla Val Sangone a Flossenbürg. Un piemontese tra guerra e lager, Alessandria, Edizioni dell’Orso, 2006.
[13] Giannantonio Agosti, Nel lager vinse la bontà (1960), Milano, Artemide, 1987 ; Attilio Armando, Dalla Val Sangone a Flossenbürg, op. cit. ; Elvia Bergamasco, Il cielo di cenere, op. cit. ; Vittore Bocchetta, ‘40-‘45, quinquennio infame, Melegnano, Montedit, 1995 ; Gaetano Cantaluppi, Flossenbürg. Ricordi di un generale deportato, Milano, Mursia, 1995 ; Pino Da Prati, Il triangolo rosso del deportato politico n. 6017, op. cit. ; Italo Geloni, Ho fatto solo il mio dovere, Pontedera, Bandecchi & Vivaldi, 2001 ; Gianfranco Mariconti, Memoria di vita e di inferno. Percorso autobiografico dalla spensieratezza alla responsabilità, sous la direction d’Ercole Ongaro, Sesto San Giovanni, Il papiro, 1995 ; Frida Misul, Deportazione: il mio diario, op. cit. ; Pietro Pascoli, I deportati. Pagine di vita vissuta, Lido, Venezia, Istituto Tipografico Editoriale, 1960 ; Goffredo Ponzuoli, “E il ricordo continua...”: memorie di un ex deportato nei campi di sterminio nazisti, Genova, Tip Graphotecnica, 1987 ; Sergio Rusich de Moscati, Il mio diario: a vent’anni nei campi di concentramento nazisti. Flossenbürg 40301, Fiesole, ECP, 1991 ; Sergio Sarri, La scatola degli spaghi troppo corti, Cuneo, L’arciere, 1999 ; Antonio Scollo, I campi della demenza, Milano, Vangelista, 1975 ; Franco Varini, Un numero un uomo, Milano, Vangelista, 1982.
[14] Goffredo Ponzuoli, “E il ricordo continua...”, op. cit., pp. 14, 16. C’est moi qui traduis ici, comme dans toutes les citations suivantes.
[15] Ibid., p. 16.
[16] Frida Misul, Deportazione: il mio diario, op. cit., p. 33.
[17] Antonio Scollo, I campi della demenza, op. cit., pp. 39, 43, 45-46, 48, 54-55, 59, 79 ; Sergio Rusich de’ Moscati, Il mio diario, op. cit. pp. 62, 170 ; Pino Da Prati, Il triangolo rosso del deportato politico, op. cit., p. 271 ; Italo Geloni, Ho fatto solo il mio dovere, op. cit., pp. 30, 52 ; Gaetano Cantaluppi, Ricordi di un generale deportato, op. cit., pp. 25, 29.
[18] Sergio Rusich de’ Moscati, Il mio diario, op. cit., p. 62.
[19] Gaetano Cantaluppi, Ricordi di un generale deportato, op. cit., p. 25.
[20] Antonio Scollo, I campi della demenza, op. cit., p. 79.
[21] Italo Geloni, Ho fatto solo il mio dovere, op. cit., p. 30.
[22] Pietro Pascoli, I deportati. Pagine di vita vissuta, op. cit., p. 99.
[23] Pino Da Prati, Il triangolo rosso del deportato politico, op. cit., p. 271.
[24] Goffredo Ponzuoli, “E il ricordo continua...”, op. cit., p. 16.
[25] Antonio Scollo, I campi della demenza, op. cit., p. 48.
[26] Ibid., pp. 51, 59.
[27] Pietro Pascoli, I deportati. Pagine di vita vissuta, op. cit., p. 114.
[28] Ibid., pp. 114-115.
[29] On constate effectivement un analogue sentiment d’appartenance à une communeauté nationale et/ou linguistique chez plusieurs témoins et écrivains de déportation. Cf. Par exemple Charlotte Delbo, Boris Pahor, Imre Kertesz.
[30] Pino Da Prati, Il triangolo rosso del deportato politico n. 6017, op. cit., p. 234.
[31] Vittore Bocchetta, ‘40-‘45, quinquennio infame, op. cit., p. 126.
[32] Goffredo Ponzuoli, “E il ricordo continua...”, op. cit., p. 17.
[33] Vittore Bocchetta, ‘40-‘45, quinquennio infame, op. cit., p. 120.
[34] Ibid., p. 154.
[35] Italo Geloni, Ho fatto solo il mio dovere, op. cit., pp. 18-19.
[36] Pietro Pascoli, I deportati. Pagine di vita vissuta, op. cit., p. 86.
[37] Sergio Sarri, La scatola degli spaghi troppo corti, op. cit., p. 64.
[38] Giannantonio Agosti, Nel lager vinse la bontà, op. cit., p. 107.