N°4 / Fin des camps. Libérations des déportés

Héros ou victimes ? La représentation de la libération du camp de Mauthausen dans les témoignages écrits de survivants français

Peter Kuon

Résumé

La libération est l’événement qui clôt le récit concentrationnaire. Pour les survivants, qu’ils écrivent immédiatement après la guerre ou quelques décennies plus tard, l’événement s’est transformé en souvenir qu’il faut exhumer pour en donner une représentation. Représentation individuelle, certes, qui cherche à restituer au je concentrationnaire son identité. Représentation collective, en ce qu’elle définit le sens de l’événement pour un groupe aux mêmes convictions politiques, religieuses ou idéologiques. Quelles sont alors les motivations des uns et des autres pour présenter la libération comme le triomphe d’une lutte commune ou un désastre de l’humanité, bref, pour se montrer victimes ou héros ? Nous étudierons la complexité de ces constructions post-événementielles en nous appuyant sur un corpus de vingt-six récits de survivants français qui se trouvèrent tous au camp central de Mauthausen à l'approche de la libération. Dans notre contribution, nous essayerons de montrer toute la gamme des possibles entre la documentation et la mythification des faits.

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Jean Gavard, dans son ouvrage Une jeunesse confisquée 1940-1945, publié en 2007, donne à l’un des derniers chapitres le titre : « Ma libération de Mauthausen ». En justifiant l’emploi du pronom possessif pour désigner une libération présentée plutôt comme un phénomène psychique (de) que comme un événement factuel (à), l’auteur précise la double nature des récits concentrationnaires : « Je crois que chaque survivant du camp a son histoire de libéré, en partie témoignage, en partie construction anachronique d’après les récits des historiens et des libérateurs américains (s’agissant de Mauthausen). »[1]

Ce que Gavard nomme témoignage correspond aux éléments personnels du récit qui implique, en même temps, une construction rétrospective d’événements extérieurs. Quel est le rapport entre le côté subjectif et le côté objectif de cette histoire ? Alors que les faits rapportés se mesurent, en dernière instance, à l’aune des reconstructions historiographiques, le vécu subjectif est plus difficile à saisir et se présente rarement à l’état brut, comme chez Gavard qui dit simplement « ce que j’ai vécu le 5 mai 1945 » :

« Pour moi, j’avais été ramené du camp annexe de Gusen au camp central le 28 avril avec un important groupe de détenus occidentaux dans l’attente d’un hypothétique rapatriement par la Croix-Rouge. J’avais perdu le peu de force qui me restait dans les conditions d’épouvantable entassement du camp central. Le 5 mai dans la matinée, je pouvais à peine tenir debout plus d’une dizaine de minutes.

J’ai le souvenir d’un immense cri ce 5 mai vers midi. J’ai pu me lever de ma paillasse et aller jusqu’à la place d’appel. J’ai aperçu des uniformes américains dans la foule des survivants. Je suis retourné m’affaler sur mon grabat. De quoi étais-je libre ? »[2]

Une jeunesse confisquée limite la représentation de la libération au vécu de l’auteur. D’autres textes de survivants français de Mauthausen nous confrontent à un amalgame bien plus complexe de récit personnel et de récit de l’Histoire, de vérité subjective et de vérité documentaire, de reconstruction factuelle et de construction fictionnelle, de mémoire individuelle et de mémoire collective. Le présent article suit les étapes de la libération du camp central de Mauthausen, des convois de la Croix-Rouge à la prise en main du camp par les Américains, en prêtant une attention particulière aux moments controversés – le saccage des dépôts de vivres, le lynchage des kapos, le combat contre les SS, le comportement des Américains – qui décident de la construction narrative et idéologique des textes[3].

LES CONVOIS DE LA CROIX-ROUGE

Des quarante-neuf auteurs qui constituent le noyau dur du corpus des témoignages sur Mauthausen[4], vingt-six se trouvèrent au camp central à l’approche de la libération. Celle-ci commença, pour les détenus français, bien avant l’arrivée des Américains. Nous savons, en effet, que, suite à des tractations entre la Croix-Rouge et le RSHA, un premier convoi, parti du camp le 22 avril, évacua 817 détenues françaises, belges et hollandaises (les « femmes de Ravensbrück ») et un contingent de 61 détenus français, un deuxième convoi, parti le 24, 183 et un troisième, parti le 28, 352 détenus, majoritairement français, belges et hollandais[5]. Si nous croyons Pierre Daix, dans Bréviaire de Mauthausen, le secrétariat du camp aurait averti le comité clandestin international qu’il « fallait compléter le convoi des femmes par quatre-vingts hommes, aussi des nations de l’ouest, l’air bien portant », et Heinrich Dürmayer, qui présidait le comité, aurait décidé qu’il fallait « envoyer les résistants les plus autorisés »[6]. Les premiers à partir étaient des responsables du PCF et du Front National. Avec ces convois, la plus grande partie des Français encore valides disparaissaient du camp. Parmi les auteurs de notre corpus, Pierre Daix, Hilfsschreiber au secrétariat central du camp, partit avec le premier convoi[7], Michel de Boüard avec le deuxième et Marcel Beauclaire, Lucien Guédon, Georges Loustaunau-Lacau, André Malavoy et Georges Séguy avec le troisième.

Alors que Loustaunau-Lacau, Malavoy et Guédon, très affaiblis, admettent, dans leurs témoignages, « ignorer »[8] les détails de cette « libération »[9] « miraculeuse »[10], les autres, à l’exception de Beauclaire (sur lequel nous reviendrons) donnent des explications plus ou moins correctes[11] – fondées sur le rapport d’Émile Valley, en 1946[12], et l’étude de Michel de Boüard, en 1954[13] – de l’accord entre la Croix-Rouge internationale et le régime nazi ainsi que du déroulement de l’évacuation.

Force est de constater que sept parmi nos vingt-six auteurs n’ont pas vécu les derniers jours du camp de Mauthausen. Pourtant, certains d’entre eux en parlent. Avant d’analyser ces curieux témoignages du non-vécu, il convient de passer en revue les récits de ceux qui étaient présents lors de l’arrivée des Américains et dont quelques-uns ont vu partir leurs camarades.

LA LIBÉRATION

En réalité, la plupart des auteurs qui parlent de la libération du camp de Mauthausen, le 5 mai, auraient dû profiter, eux aussi, de l’évacuation par la Suisse. Bernard-Aldebert, Buton, Chanut, Choumoff, Denis, Heim et Marcou furent parmi les Français qui, comme Gavard[14], recevaient le 28 avril sur la place d’appel du camp de Gusen I un colis de la Croix-Rouge[15] pour s’acheminer dans l’après-midi vers le camp de Mauthausen, en vue d’un rapatriement prévu qui, cependant, ne pouvait plus se faire à cause du déplacement du front. Leur déception, en voyant partir le dernier convoi[16], était grande : « Nous étions arrivés ici pleins d’espoirs, croyant notre libération proche, mais les camions de la Croix-Rouge n’arrivaient plus ; l’espoir fit place à l’angoisse : reverrions-nous un jour notre pays ? »[17]

Henry Denis décrit la vie de ce groupe, tiraillé entre l’attente d’une évacuation et la désillusion quotidienne, comme une « suite de bobards »[18]. À Mauthausen, ils retrouvent des camarades – Raymond Chanel, Jean Courcier, Jean Germaneau, Georges Kouyoumdjian, Georges Mazoyer, Albert Morillon – qui ont été jugés trop malades pour être évacués. Tous parlent, dans leurs textes, de leur épuisement non seulement physique, à cause d’une sous-alimentation de plus en plus dramatique et des maladies, mais aussi moral, étant donné les rumeurs qui couraient sur le plan des SS d’exterminer la totalité des prisonniers pour ne pas laisser de témoins de leurs crimes.

Les récits des témoins

Le 3 mai 1945, à l’approche des Alliés, les officiers SS quittèrent le camp de Mauthausen, laissant la garde à « un groupe d’une cinquantaine de pompiers viennois placés sous le commandement du capitaine Kern »[19]. Deux jours plus tard, vers midi, deux véhicules blindés d’une patrouille américaine sous les ordres du sergent Albert J. Kosiek pénétrèrent dans le camp. Ce fut le moment de la libération, même si le retour en force des Américains n’eut lieu que dans la journée du 6 mai.

Un an après, Émile Valley, qui avait organisé la résistance et la solidarité parmi les Français restés dans le camp, revient sur l’événement mémorable de la libération :

« Le 5 mai. Il est 2 heures lorsque nous voyons apparaître le premier tank américain, suivi de deux autres : à ce moment, il ne restait plus au camp que quelques SS et des policiers viennois.

Comment décrire le délire et l’enthousiasme qui éclatent ! Ce sont des heures inoubliables, tous s’embrassent et ne savent comment exprimer leur immense bonheur ! Et voilà qu’apparaît, hissé en haut du portail, le drapeau français, fait clandestinement à l’intérieur du camp, à sa vue l’émotion nous étreint, nous pleurons tous de joie et spontanément nous entonnons en chœur la Marseillaise. »[20]

En général, les auteurs se souviennent d’une « immense clameur »[21], d’« une explosion d’allégresse »[22], d’un moment de « folie »[23], d’une « bousculade folle »[24] pour acclamer les libérateurs. Deux de nos auteurs mentionnent la banderole Los Españoles antifascistas saludan a las Fuerzas liberadoras déployée sur le portail : « 17 m de calicot grossièrement peinturluré dans toutes les langues, amoureusement confectionné et caché par les Espagnols, durant sans doute des mois et des mois »[25], commente Morillon, alors que Marcou prend ses distances à l’égard d’une action « certes louable et compréhensible », mais trop éloigné de « l’essentiel », c’est-à-dire « de sortir de notre état d’enfermement »[26]. Un seul, Cognet, fait état, comme Gavard, d’un épuisement qui lui interdisait de participer à la fête : « Lorsque nous apprîmes que nous étions libres […], nous nous sommes sentis vides et fragiles devant tant de souffrances retenues. »[27]

Les récits des évacués

Revenons aux survivants français qui racontent un événement qu’ils n’ont pas vécu en personne ! C’est Pierre Daix qui nous livre la première version (significativement romancée) des derniers jours du camp de Mauthausen[28]. La Dernière Forteresse, publié en 1950 et salué par Louis Aragon, illustre l’action des communistes français qui, fidèles à l’esprit du Front populaire, prennent à Mauthausen « la responsabilité de veiller au salut de tous »[29], sans égard pour la nationalité ou l’idéologie, et mènent, avec le concours de leurs camarades russes, tchèques, yougoslaves et, notamment, espagnols, une lutte armée victorieuse qui aboutit à la libération du camp avant l’arrivée des Américains. Le protagoniste, André, secrétaire auxiliaire (Hilfsschreiber) dans le camp comme Daix et comme lui parti, fin avril, avec le premier convoi de la Croix-Rouge pour informer le gouvernement français de la situation catastrophique des déportés et de l’urgence d’une aide rapide, apprend le déroulement des événements à son retour à Mauthausen, quelques jours après la Libération, de la bouche des camarades espagnols de la Schreibstube (secrétariat du camp). Ceux-ci lui parlent de l’effort des déportés politiques de former des groupes armés, d’évincer les kapos verts (criminels) et de maintenir l’ordre. L’arrivée des Américains, à un moment où les politiques sont en train de s’imposer, ne suscite aucun enthousiasme : « Et puis, un soir, trois tanks américains étaient arrivés. Les SS avaient fui aussitôt. Les groupes de protection avaient immédiatement raflé armes et munitions et les politiques avaient pris le commandement du camp. Les Américains étaient repartis. »[30]

Michel de Boüard, en 1954, adopte la même attitude distanciée :

« Le 5 mai, vers midi, une voiture blindée américaine arrivait devant la grande porte du camp ; le Schupos se dispersaient. Mais peu après, le half-track recevait l’ordre de quitter Mauthausen et de pousser plus loin sa reconnaissance.

Les Häftlinge se trouvèrent alors livrés à eux-mêmes. Le Comité international de Résistance, aussitôt, prit ouvertement en mains la direction du KLM […]. »[31]

Cette façon de présenter l’événement, en omettant l’accueil qu’ont trouvé les libérateurs, minimise son importance. Elle souligne, en revanche, la fuite des corps de garde et la prise de pouvoir du comité de libération.

Nous verrons plus loin que ces accentuations, loin d’être redevables à la divergence inévitable des mémoires individuelles, dépendent d’une stratégie narrative qui vise à construire une mémoire collective officielle. Retenons, pour le moment, que cette image tendancieuse est produite par deux déportés qui n’ont pas vécu les derniers jours du camp de Mauthausen : Pierre Daix et Michel de Boüard. Certes, La Dernière Forteresse n’est qu’un roman, mais un roman qui connut un « succès fulgurant »[32] et dont il ne faudrait pas sous-estimer l’impact sur le public. Non moins influent sera « Mauthausen » de Michel de Boüard, premier article historiographique sur le camp qui fit autorité dans les décennies suivantes[33]. On ne s’étonnera pas que l’image – non seulement celle du 5 mai 1945, mais aussi celle de la libération du camp central de Mauthausen dans son ensemble – que forgent les deux auteurs au début des années cinquante, sera reprise au fil des années tant par des survivants évacués par la Croix-Rouge[34] que par d’autres, libérés dans le camp[35].

CONSTRUCTION ET DÉCONSTRUCTION D’UN RÉCIT MYTHIQUE

Le tableau d’une prise de pouvoir du comité international, qui n’avait pas besoin du secours des Alliés pour établir un nouvel ordre, ne saurait être brossé qu’au prix d’une certaine idéalisation de la réalité. Il s’agit de supprimer ou de minimiser les événements qui pourraient gêner le récit héroïque de la libération et de donner du poids à ceux qui pourraient l’appuyer.

Le saccage des dépôts de vivres

Le départ de la patrouille américaine, dans l’après-midi du 5 mai, et la disparition ou le désarmement des corps de garde viennois se traduisent, selon les uns, en une prise en main de la situation par le comité international (et l’émergence un comité français, composé, certes, de communistes, mais aussi du père Jacques[36], figure de proue de la résistance catholique) et, selon les autres, en une « pagaille incroyable »[37]. Louis Buton se souvient que, une fois les portes ouvertes pour laisser entrer la voiture blindée américaine, « ce fut la ruée vers l’extérieur » : « Des affamés se jetèrent sur les cuisines SS : ce fut une bousculade sans nom, chacun voulant avoir sa part de pitance ; en un clin d’œil, tout fut dévoré, saccagé, pillé dans cette partie du camp. »[38]

La description d’Albert Morillon est particulièrement expressive :

« “Dévalée” fantastique et effrayante (par-dessus des milliers de cadavres qui jonchent le sol) de plus de quarante-huit mille cadavres ambulants vers ce qui reste des cuisines. Pillage instantané des magasins ! Les sacs de patates, de maïs, aliments de toutes sortes, tout ce que l’administration et la discipline hitlérienne ont rassemblé, numéroté, comptabilisé, est crevé, éparpillé par cette avalanche d’affamés ! »[39]

L’auteur ne se contente pas de décrire les magasins dévastés, il raconte également, non sans complaisance, sa participation au pillage dans les environs du camp. C’est la loi du plus fort, c’est le désir de vengeance, sous le couvert d’une action altruiste :

« Encouragés, nous escaladons, au petit matin les camions abandonnés un peu partout et filons en expédition sur le village ; nous dévalisons les épiceries, les magasins sans vergogne ; mais, au retour, nous sommes pris en embuscade par des SS dissimulés et les morts jonchent à nouveau la route !…

L’après-midi, mieux organisés, nous raflons, dans la campagne environnante, cochons, vaches, moutons apeurés qui vont permettre de donner enfin à manger aux quarante-huit mille crevards du Camp ! »[40]

Il est évident que ces scènes de violence et de destruction ne sont guère compatibles avec l’image édulcorée de l’action du Comité international. C’est par une entorse à peine perceptible à la chronologie des événements que Pierre Daix sauve son panégyrique. « Des milliers d’affamés », écrit-il dans La Dernière Forteresse, « s’étaient lancés à l’assaut des cuisines, s’entretuant près des marmites de soupe géantes, se battant à mort dans les magasins, se suicidant d’indigestion. Ça avait été épouvantable. »[41] Dans son récit, ces scènes se déroulent non pas au moment de l’arrivée de la patrouille américaine aussitôt repartie, mais après la prise en possession du camp par les troupes américaines sous le commandement du lieutenant-colonel Seibel. En datant le pillage au 6 mai (au lieu du 5), Daix en rend responsables les Américains. En 2005, dans son Bréviaire de Mauthausen, l’auteur choisit la stratégie d’une négation du saccage, en renvoyant à l’efficacité des groupes armés sous le commandement du comité international : « Ils assurent l’ordre dans le camp pour empêcher la sortie d’éléments incontrôlés et les débordements des squelettes des quarantaines, protéger de leurs pillages les cuisines et les trop rares dépôts de vivres. »[42]

Le cas de Daix montre bien que les scènes de saccage, en fin de compte auto-destructrices, puisqu’elles détruisent les ressources du ravitaillement des détenus enfin libérés, dérangent tout récit qui cherche à mythifier l’action du comité international. Émile Valley est sans doute plus proche de la réalité : « À l’arrivée des premiers tanks américains, notre appareil militaire entre immédiatement en fonction et veut assurer l’ordre du camp, mais les déportes sont tellement affamés que nous sommes débordés ; ils se ruent sur la cuisine SS, se battent… »[43]

Le lynchage des kapos

La seconde explosion de violence se dirigea contre les oppresseurs. Dans La Dernière Forteresse, André, le protagoniste, apprend que, entre le départ de la patrouille américaine et l’arrivée de l’armée américaine, il y a eu une nuit, « bien employée », celle des « règlements de compte »[44]. On ne trouve trace de scènes de lynchage ni dans le premier rapport, publié en 1946, par Émile Valley, président du comité national français à la libération du camp, ni dans l’article historiographique de Michel de Boüard, paru en 1954. En revanche, Henry Denis admet du bout des lèvres qu’il y a eu « quelques règlements de compte, avec justice sommaire »[45]. Georges Marcou affirme avoir vécu « ces jours de libération du Camp dans une pagaille incroyable, avec une recrudescence de cadavres jonchant le sol, où s’entremêlaient déportés et bourreaux massacrés »[46]. Georges Kouyoumdjian mentionne le massacre de « quelques Kapos qui n’avaient pas réussi à fuir […], quelques SS aussi »[47] et, après la prise de contrôle du camp par les Américains, l’interdiction stricte de « “lyncher” les Kapos faits prisonniers »[48]. Seul Albert Morillon, encore lui, s’abandonne à une description détaillée – entre fascination morbide et répugnance affichée – de la chasse aux kapos :

« Une véritable course à la Mort s’organise sans organisation ! Dans l’immensité de ce Camp, c’est la cavalcade sur les chefs de block, les kapos, les stubendiensten, tous les salopards responsables des milliers de camarades qui ont trouvé la mort ici et ailleurs ! Popei se trouve parmi les premiers agrippés ; il hurle de peur ! Les Russes se chargent de l’étriper !

Partout, de nouveaux corps, encore resplendissants de santé, jonchent à nouveau les cours ! intestins en bouillies ! yeux arrachés ! gueules écrasées. Ça court, ça cavale dans tout le camp, dans les baraques ! Chacun détale prudemment devant l’effroyable colère des Rouskis qui, eux, ont perdu quelque trente-deux mille de leurs compatriotes inscrits, mais plus de cent mille autrement ! Le sang gicle de partout ; ça empuante la chaude odeur des abattoirs ! C’est ignoble “la VENGENCE” [sic !] !

Nous, Français, fortement regroupés, nous répugnons à ces holocaustes ! »[49]

Encore une fois, on a l’impression que le lynchage, qui pourtant était une réalité (sinon l’interdiction des Américains n’aurait pas eu de sens), n’est pas trop exhibé, parce qu’il jette une ombre sur la libération. Même Morillon, qui n’hésite pas à s’arrêter sur les détails les plus repoussants, prend soin de préciser que les Français étaient étrangers à ces excès.

Le combat contre les SS

Alors que la plupart de nos auteurs ont tendance à minimiser ou à supprimer les scènes du saccage et du lynchage, certains mettent en évidence un autre épisode – héroïque – de la libération du camp central : le combat contre les SS. Émile Valley évoque « l’angoisse »[50] des détenus, dans la nuit du 5 au 6 mai, devant la menace d’une attaque des SS certes en fuite mais qu’on soupçonnait de vouloir reprendre le camp de force. On peut se demander si cette menace fut bien réelle. Si les uns, Morillon, en 1984, et Chanut, en 2008[51], appuient le témoignage de Valley, d’autres, Denis, en 1989, et Marcou, en 2010, ne se souviennent pas d’avoir craint « une réaction des SS »[52] qui s’étaient retirés « sur le Danube, à proximité du pont de chemin de fer qui mène à la gare de Mauthausen, afin probablement de disparaître plus aisément »[53]. Pourtant, l’essentiel est que le comité international s’attendait à une contre-attaque et forma, dès le départ de la patrouille américaine, des groupes armés pour défendre le camp et battre la campagne à la recherche de SS en fuite. Au cours de ces opérations, il y eut, dans la nuit du 5 au 6, une escarmouche :

« Dans la nuit, il y eut un commencement d’attaque des SS, mais grâce à l’organisation militaire sous le commandement d’un major russe et d’un colonel espagnol, les 18 000 internés ont été sauvés, nous n’avons eu à déplorer qu’un mort espagnol et douze blessés ; je veux signaler ici l’attitude courageuse de nos camarades espagnols ; grâce à eux, nous avions pu nous emparer des armes et ils ont été avec nos camarades soviétiques les éléments moteurs de notre organisation militaire. »[54]

Sous la plume de Pierre Daix, le « commencement d’attaque » qu’évoque Émile Valley se transforme, dans La Dernière Forteresse, en une véritable bataille : « Au soir, les SS s’étaient ressaisis. Ils avaient fait un Kommando avec des lance-flammes et des mitrailleuses pour reprendre le camp. Les copains avaient dû se battre toute la nuit pour les empêcher de passer. »[55] À son tour, Michel de Boüard, qui – rappelons-le – n’était pas non plus présent sur les lieux, va jusqu’à attribuer l’initiative du combat aux groupes armés :

« Il s’agissait avant tout de repérer les formations de SS demeurées dans la région et de prévenir leur retour offensif. L’unité SS qui défendait, près du village de Mauthausen, le pont de chemin de fer sur le Danube, fut attaquée par les Häftlinge. Ceux-ci subirent, au cours de l’opération, des pertes, parmi lesquelles celle de Badia, l’un des plus actifs des résistants espagnols. »[56]

On peut se demander pourquoi deux survivants, impliqués dans l’action du comité clandestin, mais évacués avant la libération du camp, ont ressenti le besoin, au début des années 1950, de renchérir sur le récit d’Émile Valley[57]. Voulaient-ils racheter des années d’impuissance devant les SS par un récit qui mettaient les détenus sur un pied d’égalité avec les résistants combattants qui avaient libéré Paris et la France ? Le combat contre les SS serait alors la pierre angulaire d’un récit héroïque qui intègre les déportés dans le grand mythe de la Résistance. Georges Marcou, en 2010, s’attaque indirectement à cette image d’une auto-libération, quand il parle d’une « expédition punitive », complètement inutile, d’une « quarantaine de déportés essentiellement Espagnols, armés de fusils de pacotille et de quelques gourdins » et regrette que le comité français n’ait pas pu expliquer aux Espagnols « que l’heure n’était pas à la vengeance personnelle »[58].

Le comportement des Américains

La mise en relief de l’action du comité international va de pair avec la critique de l’inefficacité des Américains. L’exclamation « Hélas »[59] d’Émile Valley, après avoir évoqué l’accueil enthousiaste des libérateurs, donne le ton. Elle exprime la déception tout à fait compréhensible que les Américains, complètement dépassés, n’arrivaient pas à gérer une situation à laquelle ils ne s’attendaient pas et qui se présentait comme une véritable catastrophe humanitaire, avec des centaines des cadavres empilés et des milliers de moribonds, de malades et d’affamés livrés à eux-mêmes. Henry Denis et Louis Buton, qui se trouvaient dans la foule des malades, se plaignent, des années plus tard, que le « ravitaillement laissait beaucoup à désirer »[60] et que, au fond, l’« arrivée des Américains n’entraîn[ait] aucune amélioration sanitaire ni alimentaire »[61]. La critique de Valley se réfère, cependant, moins à l’inefficacité de l’aide matérielle qu’à la décision de fermer le camp, ce qui empêchait les groupes armés, formés par le comité international, « d’aller réquisitionner la viande fraîche […] qui aurait sans doute sauvé bon nombre d’entre nous »[62]. En légitimant la nécessité des groupes armés, même si l’argument n’est pas convainquant, Valley réagit à leur dissolution par ordre des Américains. La fermeture du camp s’accompagne, en effet, du désarmement des survivants. Dans la logique des Américains, cette décision s’imposa :

« Lorsque le camp fut découvert, pour la première fois, les internés armés furent désarmés et, comme ils essayaient de piller, de voler, ne faisaient aucune attention aux règles d’hygiène et s’emparaient de tout ce qui leur tombait sous la main, précieux ou non, il fut nécessaire de recourir à une discipline plutôt énergique, qui fut progressivement relâchée quand les internés firent preuve de plus de responsabilité sociale. »[63]

En même temps, ces mesures draconiennes désavouent les efforts qu’avait déployés le comité international pour prendre en main la situation après le départ des SS. Michel de Boüard a sans doute raison quand il écrit que le « lieutenant-colonel Seibel et ses hommes semblent ne pas avoir équitablement jugé – au premier abord, du moins – les hommes qu’ils prenaient en charge »[64]. Le refus initial de prendre au sérieux le comité international explique pourquoi le désarmement des combattants et la fermeture du camp sont vus d’un mauvais œil par Morillon, Denis, Kouyoumdjian, Courcier, Marcou et Chanut[65]. Ce dernier déclare : « Notre surprise fut douloureuse en constatant que nous étions à nouveau prisonniers, des alliés en plus ! » Un seul parmi les survivants de Mauthausen, Jean Gavard, exprime sa gratitude pour avoir été soigné par des médecins et des infirmiers américains[66].

Pierre Daix occupe de nouveau une place à part. Sans avoir vécu la situation, il attribue, en 1950, au désarmement des combattants toute la « pagaille » qui régnait dans le camp et faisait « crever » les camarades « par centaines »[67].

HÉROS OU VICTIMES ?

La libération met donc un point final au récit concentrationnaire. Pour les survivants, qu’ils écrivent immédiatement après la guerre ou quelques décennies plus tard, l’événement s’est transformé en souvenir qu’il faut exhumer pour en donner une représentation. Représentation individuelle, certes, qui cherche à restituer au je concentrationnaire son identité.Représentation collective aussi, en ce qu’elle définit le sens de l’événement pour un groupe aux mêmes convictions politiques, religieuses ou idéologiques. Quelles sont alors les motivations des uns et des autres pour présenter la libération comme le triomphe d’une lutte commune ou un désastre de l’humanité, pour se montrer victimes ou héros ?

La libération des Français dans le camp central de Mauthausen a été réalisée en deux, voire en trois étapes : d’abord, fin avril, par l’arrivée des camions de la Croix-Rouge, ensuite, le 5 mai, par l’arrivée d’une patrouille américaine, puis, le lendemain, par l’arrivée des troupes américaines du lieutenant-colonel Seibel. L’évacuation des détenus relativement bien portants avait démantelé le réseau des Français qui apportaient leur soutien au comité international clandestin. La plupart des survivants français restés dans le camp étaient trop faibles ou trop malades pour jouer un rôle actif au moment de la libération. À l’exception de Choumoff, qui participa à l’arrachement de l’aigle de bronze sur le portail du camp, de Morillon, qui devint commandant d’un groupe armé, de Chanel, qui continua son travail de médecin (mais n’en parle pas dans son témoignage) et, bien évidemment, de Valley, ils sont à l’écart des activités du comité international et vivent l’angoisse d’une attaque des SS, le soulagement de l’arrivée des Américains, les scènes de saccage et de lynchage, les maladresses des libérateurs qui tardent à apporter une aide efficace.

En bref, les Français libérés le 5 mai 1945 à Mauthausen n’ont pas une histoire bien glorieuse à raconter. Même Valley, leur chef de file, admet le rôle plutôt modeste joué par les Français, tout en mettant en lumière le courage des camarades espagnols et soviétiques. On peut donc s’étonner que quelques-uns parmi les Français évacués par la Croix-Rouge proposent d’autres versions, plus satisfaisantes, d’une libération qu’ils n’ont pas vécue mais dont ils façonnent une image idéale. C’est ainsi que Marcel Beauclaire élude son retour au camp central et son rapatriement par la Croix-Rouge pour substituer à une réalité, jugée trop banale, une évasion du camp de Wiener-Neustadt qui, d’aventure en aventure, amènera son alter ego, Jacques Robert (le nom de guerre de l’auteur), à rejoindre les partisans titistes. Beauclaire remplit un vide au niveau du vécu, le vide d’une libération qui ne correspondait nullement à ses expectatives, par un récit qui construit le mythe personnel d’une libération qu’il aurait voulu vivre, une libération pleine de sens. Le même souci de faire sens anime Pierre Daix et Michel de Boüard dans leurs tentatives bien plus ambitieuses d’élaborer un récit mythique à visée collective. Malgré les différences entre narration fictionnelle et narration historiographique, La Dernière Forteresse et « Mauthausen » proposent, grosso modo, le même récit : avant l’arrivée des troupes américaines, le comité international aurait pris le pouvoir, en désarmant les corps de garde, en formant des groupes armés, en combattant victorieusement les SS et en assurant l’ordre dans le camp, jusqu’au moment où les Américains désarment les détenus, sans être eux-mêmes capables de gérer la situation. Cette version des événements requiert, ce qui est caractéristique d’une construction fortement idéologique, la suppression ou l’adaptation de tous les éléments qui pourraient l’ébranler : l’accueil enthousiaste des Américains, le saccage des dépôts de vivres, le maraudage dans les environs du camp, le lynchage des kapos. Le but de l’opération est de produire une histoire héroïque de la libération qui valorise les détenus comme combattants.

Le fait qu’en 2005, à cinquante ans de la libération, Pierre Daix, dans son Bréviaire de Mauthausen, revienne à sa version de la libération[68], en se réclamant de l’autorité de Michel de Boüard et du républicain espagnol Manuel Razola[69] prouve qu’elle se veut mythe collectif (et non pas seulement individuel). En effet, si nous étendions notre analyse aux témoignages des survivants espagnols, nous pourrions voir que leur représentation de la libération du camp central de Mauthausen s’appuie normalement – et à plus forte raison que chez les Français – sur le modèle de l’auto-libération. Si, en revanche, nous nous tournions du côté des Italiens, mais ce sera l’objet d’une autre étude, nous pourrions observer que le nombre de survivants qui admettent leur extrême faiblesse au moment de la libération et renoncent à combler le vide du vécu par un récit identitaire, est étonnamment élevé.

Dire l’impuissance du je, comme le fait Jean Gavard dans notre citation initiale, est sans doute plus difficile que de raconter l’action solidaire d’un collectif.

 


[1] Jean Gavard, Une jeunesse confisquée 1940-1945, Paris, L’Harmattan, 2007, p. 84, qui renvoie, pour la reconstruction des historiens, à Michel Fabréguet, Mauthausen. Camp de concentration national-socialiste en Autriche rattachée (1938-1945), Paris, Champion, 1999. C’est nous qui soulignons.

[2] Jean Gavard, Une jeunesse confisquée 1940-1945, op. cit., pp. 84-85.

[3] D’un point de vue méthodique, nous reprenons la démarche d’une étude préliminaire sur la libération du camp d’Ebensee, camp annexe de Mauthausen, voir Peter Kuon, L’écriture des revenants. Lectures de témoignages de la déportation politique, Paris, Kimé, 2013, pp. 223-252.

[4] Pour la description du corpus de Mauthausen, voir Ibid., pp. 35-48.

[5] Voir Michel Fabréguet, Mauthausen, op. cit., pp. 599-606.

[6] Pierre Daix, Bréviaire de Mauthausen, Paris, Gallimard, 2005, pp. 89-90.

[7] Pierre Daix, gêné par ce traitement de privilégié, souligne qu’il a été mis sur la liste des partants par l’officier SS de service.

[8] Georges Loustaunau-Lacau, « Chiens maudits ». Souvenirs d’un rescapé des bagnes hitlériens, Pau, Éditions « La Spirale », 1945, p. 95.

[9] André Malavoy, La mort attendra, Montréal, Les Éditions de l’Homme, 1961, p. 121.

[10] Lucien Guédon, Sous l’aile de la mort. Mauthausen, Ruffec, Imprimerie-Éditions La Péruse, 1997, p. 239.

[11] Voir Pierre Daix, La Dernière Forteresse, Paris, Les éditeurs français réunis, 1950, pp. 402-403, et Bréviaire de Mauthausen, op. cit., pp. 91-92, ainsi que Georges Séguy, Résister. De Mauthausen à Mai 68, Paris, L’Archipel, 2008, p. 105.

[12] Voir Émile Valley, « Il y a un an », Bulletin intérieur d’information et de liaison de l’Amicale des déportés politiques de Mauthausen, no 5, mai 1946, pp. 1-2. Nous ajoutons ce bref texte à notre corpus, qui ne comporte, en principe, que des écrits d’une certaine envergure. Plusieurs de nos auteurs (Morillon, Marcou, Daix) font l’éloge de Valley qui, au lieu de partir avec les camions de la Croix-Rouge, est resté dans le camp, au milieu des malades et des moribonds, pour aider l’organisation clandestine dans une situation de plus en plus désespérée.

[13] Voir Michel de Boüard, « Mauthausen », Revue d’histoire de la Deuxième Guerre mondiale, nos 15-16, 1954, pp. 73-75.

[14] Voir Jean Bernard-Aldebert, Chemin de croix en 50 stations. De Compiègne à Gusen II en passant par Buchenwald, Mauthausen, Gusen I, Paris. F. Brouty-J. Fayard et Cie, 1946, p. 112 ; Louis Buton, Un Vendéen résistant et déporté, La Crèche, Geste éditions, 2003, pp. 188-189 ; Robert Chanut, 365 jours de survie à Gusen I. Ô terre de détresse…, Avrigney, Atyka, 2011, p. 72 ; Pierre Serge Choumoff, Les Assassinats nationaux-socialistes par gaz en territoire autrichien 1940-1945, Vienne, Bundesministerium für Inneres, 2000, p. 19 ; Henry Denis, Le Cahier vert d’Henry Denis, s.l. [Toulon], AGPM, s.d. [1989], pp. 71-72 ; Jean Gavard, Une jeunesse confisquée 1940-1945, op. cit., pp. 84-85 ; Roger Heim, La Sombre Route, Paris, Librairie José Corti, 1947, pp. 82-88 ; Georges Marcou, Souvenirs de mon vécu… au Camp de Gusen I. « Une parenthése… 1942-1945. L’ordinaire de notre souffrance à Mauthausen », Gradignan, Autoédition, 2010, pp. 158-160. D’autres auteurs de notre corpus qui faisaient partie du même groupe (Jean Cayrol, Bernard Cognet, Maurice Petit, Henri-Jean Dutertre) ne mentionnent pas le transfert de Gusen à Mauthausen.

[15] Roger Heim, La Sombre Route, op. cit., pp. 83-85, se souvient, en 1947, de cette scène « monstrueuse, fantastique » à Gusen, où « 800 Français survivants, alignés sur la place, auxquels on venait de donner l’ordre de ne plus manger […], se précipitèrent sur leurs aliments comme des bêtes. […] Et autour de la place, des centaines d’autres déportés, ceux-là à demeure, et sous l’horloge des dizaines de SS, et de sa fenêtre le commandant du camp, observaient, les yeux agrandis de stupéfaction, ce spectacle hallucinant de 800 hommes qui dévoraient, malgré l’ordre, dans un mélange innommable, le sucre et la viande, les confitures et le fromage, emplissant leurs mains de poudre de cacao dont ils se noircissaient la face dans leur frénésie. Les boîtes vides, les papiers, les emballages, bien vite se répandaient sur le sol en un désordre inconnu. Et cependant aucune salve de mitrailleuse, aucun coup de revolver, aucune rafale, pas même de coups de bâton, ne mettaient fin à ce spectacle de révolte, ce mirage de folie, cette exaspération alimentaire, cette imprudence incommensurable. »

[16] Voir Henry Denis, Le Cahier vert d’Henry Denis, op. cit., pp. 71-72.

[17] Louis Buton, Un Vendéen résistant et déporté, op. cit., p. 189.

[18] Henry Denis, Le Cahier vert d’Henry Denis, op. cit., pp. 71-72.

[19] Michel Fabréguet, Mauthausen, op. cit., p. 609.

[20] Émile Valley, « Il y a un an », art. cit., p. 1. Le fait que ce passage soit repris littéralement par Jean Germaneau [Mauthausen. Kommando de Hinterberg bei Peggau, Paris, Amicale de Mauthausen, 1982, p. 28], et, avec quelques retouches, par Louis Buton [Un Vendéen résistant et déporté, op. cit., 2003, pp. 191-192], prouve l’autorité de ce premier récit de la libération de Mauthausen.

[21] Robert Chanut, Parcours d’un déporté, Marnay, Autoédition, 2008, p. 54.

[22] Roger Heim, La Sombre Route, op. cit., p. 89.

[23] Jean Courcier, Moi, Jean Courcier. Mes 20 ans, de la résistance à la déportation, Véronique Beaux, Jacques Thouroude (éds), Rennes, Apogée, 2003, p. 91.

[24] Henry Denis, Le Cahier vert d’Henry Denis, op. cit., p. 73. Louis Buton, en revanche, évoque un « cortège » qui, « drapeaux déployés, marcha vers les libérateurs », in Un Vendéen résistant et déporté, op. cit., p. 192.

[25] Albert Morillon, 34 577, Rochefort-sur-Mer, Imprimerie Lafayette, 1984, p. 155, voir aussi Jean Courcier, Moi, Jean Courcier, op. cit., p. 91.

[26] Georges Marcou, Souvenirs de mon vécu…, op. cit., p. 161.

[27] Bernard Cognet, Mémoires de révoltes et d’espérance, Saint-Jean-de-Bray, Imprimerie nouvelle, 1997, p. 166. Ajoutons le cas curieux de Chanel, médecin-prisonnier, qui passe directement du dépérissement des derniers jours à l’hôtel Lutétia. Voir Raymond Chanel, Un médecin en enfer, Paris, Librairie académique Perrin, 1970, pp. 282-289.

[28] Pour une analyse plus détaillée du roman, voir Peter Kuon, L’écriture des revenants, op. cit., pp. 256-267.

[29] Pierre Daix, La Dernière Forteresse, op. cit., p. 69.

[30] Ibid., pp. 401-402.

[31] Michel de Boüard, « Mauthausen », art. cit., p. 77.

[32] Pierre Daix, Tout mon temps. Révisions de ma mémoire, Paris, Fayard, 2001, p. 307.

[33] En employant fréquemment la première personne du pluriel, l’auteur laisse à entendre qu'il a vécu les événements dont il parle, bien qu’il ait été rapatrié, comme Daix, par la Croix-Rouge. Sa reconstruction de la libération, entre le 21 avril et le 7 mai, est la seule partie de son article qui n’indique pas de sources.

[34] Parmi les auteurs évacués, Pierre Daix [Bréviaire de Mauthausen, op. cit., pp. 95-101] reprend, en 2005, l’article de Michel de Boüard, alors que Georges Séguy [Résister. De Mauthausen à Mai 68, op. cit., pp. 106-107], plus prudent, se limite à évoquer la prise en main du camp, le 5, par le comité international. Guédon, Loustaunau-Lacau et Malavoy s’abstiennent de raconter des événements qu’ils n’ont pas vécus. Marcel Beauclaire, lui, clôt son témoignage [Les Fugitifs de l’enfer, Paris, La Pensée universelle, 1972] par un récit d’évasion, inventé de toutes pièces.

[35] Voir notamment Buton, Chanut, Courcier, Dutertre, Kouyoumdjian et Morillon sur lesquels nous reviendrons.

[36] Voir aussi Pierre Serge Choumoff, Les Assassinats nationaux-socialistes par gaz, op. cit., p. 19.

[37] Georges Marcou, Souvenirs de mon vécu…, op. cit., p. 162.

[38] Louis Buton, Un Vendéen résistant et déporté, op. cit., p. 192 ; voir aussi Henry Denis, Le Cahier vert d’Henry Denis, op. cit., p. 73, et Georges Marcou, Souvenirs de mon vécu…, op. cit., p. 163.

[39] Albert Morillon, 34 577, op. cit., p. 155.

[40] Ibid., p. 158.

[41] Pierre Daix, La Dernière Forteresse, op. cit., p. 402.

[42] Pierre Daix, Bréviaire de Mauthausen, op. cit., p. 97.

[43] Émile Valley, « Il y a un an », art. cit., p. 2. C’est nous qui soulignons.

[44] Pierre Daix, La Dernière Forteresse, op. cit., p. 402.

[45] Henry Denis, Le Cahier vert d’Henry Denis, op. cit., p. 74.

[46] Georges Marcou, Souvenirs de mon vécu…, op. cit., p. 162.

[47] Pierre Georges Henry Kouyoumdjian, Survivant de Mauthausen, Paris, Belledonne, 1996, p. 190.

[48] Ibid., p. 188.

[49] Albert Morillon, 34 577, op. cit., pp. 158-159.

[50] Émile Valley, « Il y a un an », art. cit., p. 2.

[51] Albert Morillon, 34 577, op. cit., p. 158, et Robert Chanut, Parcours d’un déporté, op. cit., p. 55.

[52] Henry Denis, Le Cahier vert d’Henry Denis, op. cit., p. 72.

[53] Georges Marcou, Souvenirs de mon vécu…, op. cit., p. 160.

[54] Émile Valley, « Il y a un an », art. cit., p. 2.

[55] Pierre Daix, La Dernière Forteresse, op. cit., pp. 401-402.

[56] Michel de Boüard, « Mauthausen », art. cit., p. 77, repris par Jean Courcier, Moi, Jean Courcier, op. cit., p. 92.

[57] Michel Fabréguet, au bout de sa reconstruction minutieuse du rôle joué par la résistance clandestine dans les derniers jours de Mauthausen, en vient à la conclusion que le récit d’une lutte armée, dans la nuit du 5 au 6 mai, contre les unités SS du Hauptsturmführer Bachmayer ne saurait être étayée par les faits. Voir Michel Fabréguet, Mauthausen, op. cit., p. 611-615.

[58] Georges Marcou, Souvenirs de mon vécu…, op. cit., pp. 164-165.

[59] Émile Valley, « Il y a un an », art. cit., p. 2.

[60] Louis Buton, Un Vendéen résistant et déporté, op. cit., p. 193.

[61] Henry Denis, Le Cahier vert d’Henry Denis, op. cit., p. 74.

[62] Émile Valley, « Il y a un an », art. cit., p. 2.

[63] Rapport américain du 7 juin 1945 (Arolsen, O.C.C : 15/125/f), cité par Michel de Boüard, « Mauthausen », art. cit., p. 78, n. 2.

[64] Michel de Boüard, « Mauthausen », art. cit., p. 78.

[65] Voir Albert Morillon, 34 577, op. cit., p. 160, Henry Denis, Le cahier vert d’Henry Denis, op. cit., p. 74 ; Pierre Georges Henry Kouyoumdjian, Survivant de Mauthausen, op. cit., p. 192 ; Jean Courcier, Moi, Jean Courcier, op. cit., p. 94 ; Georges Marcou, Souvenirs de mon vécu…, op. cit., p. 165 ; Robert Chanut, Parcours d’un déporté, op. cit., p. 61.

[66] Voir Jean Gavard, Une jeunesse confisquée 1940-1945, op. cit., pp. 88-89. Henri-Jean Dutertre mentionne, sans commentaire, qu’il fut soigné par les Américains. Voir Henri-Jean Dutertre, Un parcours parmi tant d’autres, Nantes, OPERA, 1995, p. 277.

[67] Pierre Daix, La Dernière Forteresse, op. cit., p. 402.

[68] Pierre Daix, Bréviaire de Mauthausen, op. cit., pp. 98-100.

[69] Voir Manuel Razola et Mariano Constante, Triangle bleu. Les républicains à Mauthausen 1940-1945, préface de Pierre Daix, Paris, NRF Gallimard, 1969, pp. 160-171.

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Entre angoisse et espoir. Expériences de survivants de l’évacuation du camp annexe de Melk

Alexander Prenninger

Le rôle de Mauthausen comme camp d’évacuation ainsi que la dissolution des camps annexes n’ont, à ce jour, guère fait l’objet de travaux de recherches. Pour les détenus, l’évacuation du camp annexe de Melk était la dernière étape d’une série de convois depuis le début de leur déportation. Elle était associée à l’angoisse de se faire tuer dans les derniers jours et à l’espoir de la libération proche. Les expériences des survivants sont cependant extrêmement diverses selon les méthodes adoptées...

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