N°8 / Les usages problématiques des mots du mal

Les mots de la souffrance. Les camps français dans la mémoire des républicains espagnols

Geneviève Dreyfus-Armand

Résumé

La mémoire des républicains, vaincus de la guerre civile espagnole et européenne de 1936-1939, est encore aujourd’hui mal cicatrisée. Réfugiés en France en 1939 pour sauver leur vie et leur liberté, ils sont considérés comme des « étrangers indésirables » et, à ce titre, internés dans des camps par les autorités alors qu’ils ont été les premiers à se battre contre les fascismes. Le texte analyse les terminologies utilisées par les pouvoirs publics et par les historiens, notamment français, puis la formation de la mémoire de cette période chez les réfugiés espagnols qui, toujours, utilisent le terme officiel de l’époque – camp de concentration – alors même que certains ont connu les camps nazis. Des exemples issus d’un ample corpus de presse et de publications attestent de ce choix revendiqué de vocabulaire, que les historiens se doivent d’expliquer et de comprendre.

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Longtemps occultée en France comme en Espagne, la mémoire des républicains espagnols, vaincus de la terrible guerre civile européenne de 1936-1939, est encore aujourd’hui mal cicatrisée. Les politiques publiques ont tardivement et incomplètement – particulièrement en Espagne – pris en compte leur histoire souvent tragique et mesuré à leur juste valeur leurs apports innombrables au devenir démocratique des deux pays.

En ce qui concerne la France, la reconnaissance officielle, au plus haut niveau de l’État, de leur rôle pendant la guerre mondiale dans des unités combattantes aux côtés des Alliés ou dans la Résistance a tardé. C’est le 25 août 2014, soixante-dix ans après les faits, qu’un président de la République française a, pour la première fois, reconnu officiellement le rôle de la Nueve et des républicains espagnols dans la libération de Paris et de la France. Au-delà de ce déficit de reconnaissance ou, du moins, de son caractère tardif, les républicains espagnols et, présentement, leurs descendants, considèrent de façon amère tant la politique française de non-intervention pendant la guerre d’Espagne que les conditions de leur arrivée dans l’Hexagone.

À la conscience douloureuse d’avoir, les premiers, combattu les fascismes avec leurs seules forces et à l’incompréhension d’avoir été abandonnés face à cette noire coalition, s’ajoute l’humiliation d’avoir été des « étrangers indésirables » sur le sol d’un pays qu’ils considéraient comme la patrie des droits de l’homme. C’est pourquoi, dans leurs têtes et dans leurs cœurs, les camps institués par le décret du 12 novembre 1938 restent intitulés comme ils étaient officiellement désignés alors, des camps de concentration ; et ce, même après la révélation de l’existence des camps nazis qu’un certain nombre d’entre eux ont, par ailleurs, connus.

Une brève exploration des termes utilisés par les pouvoirs publics et par les historiens français précédera une présentation de la terminologie constante employée par les républicains espagnols exilés eux-mêmes et par leurs descendants.

Les camps français : les mots du pouvoir et des historiens

Que l’on ne se méprenne pas. Les mots du pouvoir et des historiens ne sont pas les mêmes. Les pouvoirs publics français ont adopté des expressions différentes pendant la période 1939-1945, pour des raisons d’opportunité politique. Quant aux historiens, ils ont eu la nécessité d’utiliser un terme générique permettant de désigner l’ensemble des camps français de ces années de guerre, même si une périodisation a été indispensable pour caractériser l’évolution de ces lieux et leurs fonctions successives. À cela s’ajoute, pour l’historien, sa responsabilité sociale – civique pourrait-on dire – d’aider ses lecteurs et notamment un jeune public à ne pas confondre toutes les notions et à ne pas mélanger des situations historiques différentes. Dans un pays comme la France qui a vu partir pour les camps nazis, de concentration et d’extermination, des dizaines de milliers de personnes, dont de nombreux Juifs, la clarification de la terminologie s’impose. En cela, les historiens anglo-saxons et espagnols, moins soumis à cette injonction, adoptent divers termes, ceux de l’époque ou ceux retenus préférentiellement aujourd’hui, avec une relative indifférence lexicale.

Comme on le sait, ce sont les Espagnols qui ont, les premiers à l’époque contemporaine, mis en place des « camps de reconcentration » à Cuba, pendant la guerre d’indépendance de l’île à la fin du XIXe siècle. Le terme « camp de concentration » apparaît en anglais en 1901 lors de la guerre menée contre les Boers par les Britanniques en Afrique du Sud au début du siècle dernier[1]. Des camps de concentration et, pour la première fois, de travail forcé, sont ouverts en 1905 par les colonisateurs allemands pour les Hereros, dans le sud-ouest africain, l’actuelle Namibie. Dans cette lignée, une série de camps de concentration s’ouvriront dans ce premier XXe siècle en période de guerre, disparaissant ensuite sans laisser des traces profondes dans la mémoire collective, comme ceux de la Première Guerre mondiale en France et en Grande-Bretagne. Dans ces deux pays, on interne à partir de 1914 les Allemands, les Austro-Hongrois ou les Ottomans qui y résident.

En 1939, lorsque la guerre mondiale éclate, aussi bien en France qu’en Grande-Bretagne, des mesures administratives de détention sont prises à l’encontre des ressortissants d’Allemagne ou d’Autriche. Mais les deux pays n’adoptent pas tout à fait la même politique. Instruite par les conséquences néfastes des camps d’Afrique du Sud, marqués par de nombreux morts, ce qui a fait scandale à Londres, et par les internements indifférenciés pratiqués lors de la Première Guerre mondiale, analysés au plus haut niveau de l’État, la Grande-Bretagne procède, au moins dans un premier temps, à des internements ciblés des ressortissants des puissances étrangères[2].

Sans avoir la même expérience historique que la Grande-Bretagne ni une réflexion analogue sur les camps de concentration, la France se trouve, dès avant le déclenchement de la Seconde Guerre mondiale, dans un contexte différent de celui du pays d’outre-Manche. Une fois la parenthèse du Front populaire close, en avril 1938, le gouvernement d’Édouard Daladier multiplie les mesures à l’encontre des « étrangers indésirables » : le 2 mai suivant, l’assignation à résidence et la surveillance sont prescrites pour les étrangers frappés par un arrêté d’expulsion et qui ne parviennent pas à obtenir un visa pour quitter la France. Le 12 novembre 1938, un décret prévoit, pour ces mêmes « étrangers indésirables », l’internement dans des « centres spéciaux » où ils feront l’objet d’une surveillance permanente[3]. Comme le souligne Anne Grynberg, « la confusion s’est instaurée progressivement, tout au long des années trente, entre étranger/réfugié/ennemi »[4] : la politique d’immigration devient de plus en plus restrictive au fur et à mesure que la crise économique et sociale frappe le pays, doublée d’une crise d’identité marquée par la montée de l’instabilité politique et de la xénophobie.

Si bien que les pouvoirs publics français emploient tout naturellement, pour désigner ces « centres spéciaux » prescrits par le décret de novembre 1938, le même terme que pendant la Première Guerre mondiale, celui de camp de concentration. Après la Retirada, ce grand exode de près d’un demi-million de civils et de militaires espagnols survenu fin janvier et début février 1939, les hommes en âge de porter les armes – et, parfois aussi des femmes et des enfants – sont conduits vers ces « centres » prévus par le décret. À la mi-février 1939, ils sont quelque 275000 réfugiés espagnols à être internés dans les camps improvisés à la hâte sur les plages du Roussillon. La tradition administrative ne fait que reprendre un terme usité pour les nommer. C’est ainsi qu’Albert Sarraut les définit au début du mois de février :

« Le camp d’Argelès-sur-Mer ne sera pas un lieu pénitentiaire mais un camp de concentration. Ce n’est pas la même chose. Les asilés qui y prendront séjour n’y resteront guère que le temps nécessaire pour préparer leur refoulement ou, sur leur option, leur libre passage de retour en Espagne. »[5]

Le terme de « camp de concentration » est employé constamment à l’époque dans les documents administratifs, qu’ils émanent des différents ministères, de l’armée ou des municipalités. Il s’agit bien de la définition qu’en donne le Larousse de 1927 : « Les camps de concentration sont des camps de refuge dans lesquels on rassemble, sous la surveillance de troupes, soit des populations civiles de nationalité ennemie, soit des suspects, soit des soldats prisonniers. » [6] Les réfugiés républicains espagnols n’étant pas des ressortissants de nationalité ennemie ni des soldats prisonniers, ils sont, de toute évidence, des suspects qu’il faut surveiller et contrôler.

Au cours des années suivantes, où les réfugiés espagnols seront encore, pour beaucoup, à nouveau internés, les dénominations officielles des camps changent considérablement, en fonction d’impératifs politiques. Si le camp de Rieucros, en Lozère, est appelé en septembre 1939 « centre de rassemblement d’étrangères », il devient « camp de concentration » en janvier 1941[7]. En revanche, le camp de Rivesaltes est considéré comme un « centre de regroupement familial », un centre d’hébergement, lors de son ouverture massive aux familles, notamment espagnoles, en janvier 1941. Le camp de Djelfa, en Algérie, est intitulé « centre de séjour surveillé »[8] . Les exemples de changement de dénomination administrative sont nombreux.

Quant aux historiens, ils se sont penchés assez tardivement sur les camps français, à partir du milieu des années 1980 et surtout dans les années 1990. Leur souci légitime est alors de trouver une terminologie qui ne prête pas à confusion avec les camps nazis dont l’étude scientifique commence à se développer[9]. L’un des premiers à étudier un camp français, Claude Laharie, ne cache pas son embarras, en 1985, à propos de la première période du camp de Gurs, celle de l’année 1939 :

« Gurs n’est pas […] un “camp de concentration”. Le terme, largement utilisé en 1939 […] a pris, depuis, une toute autre signification. […] Gurs n’est pas davantage un simple “centre d’accueil” ou “centre d’hébergement” à l’intérieur duquel les internés peuvent attendre en toute quiétude des jours meilleurs. Et “l’accueil” offert aux arrivants évoque davantage l’emprisonnement que l’hospitalité. À vrai dire, on cherche vainement un terme pour désigner ce camp. »[10]

De même, en 1989, Pierre Vilar, grand historien spécialiste de l’Espagne, précise dans sa préface à Plages d’exil. Les camps de réfugiés espagnols en France  :

« Je n’aime pas l’usage extensif du terme camp de concentration, assez souvent appliqué aux camps que ce livre décrira. Au sens strict, le terme n’est pas inexact : à Argelès ou Saint-Cyprien, on concentra bien, en effet, plusieurs dizaines de milliers d’hommes. Mais les mots ont une histoire. Auschwitz ou Mauthausen ont donné à ceux de camp de concentration une charge telle qu’il faut en faire un emploi prudent. »[11]

À juste titre, les historiens français sont soucieux de ne pas introduire de confusion, auprès de leurs lecteurs, entre des camps où l’on interne, où l’on souffre, où l’on meurt, par indifférence, incurie ou rigidité administrative, et des « camps concentrationnaires » relevant d’un système, d’un « univers concentrationnaire » [12] dont l’objet est de soumettre, de broyer et d’éliminer l’individu. Ces historiens appellent donc « camps d’internement » les camps français d’avant et d’après la Seconde Guerre mondiale, qu’ils répondent à des situations exceptionnelles ou qu’ils correspondent, sous le régime de Vichy, à des logiques d’exclusion, de répression ou de persécution. Ainsi, pour Annette Wieviorka, « l’expression “camp de concentration” est trop erratique pour permettre d’appréhender des phénomènes différents », n’obéissant pas à des logiques de même nature, ce qui risque d’interdire leur étude[13]. Denis Peschanski, qui s’est longuement penché sur l’histoire des camps français, opte pour l’expression générique « camp d’internement » :

« La difficulté croît si l’on considère les statuts qu’ont connus les camps français d’internement : certains sont dits d’internement, mais d’autres d’hébergement, de transit, voire de concentration. Ils relèvent tous de notre objet d’étude, même si la différence de terminologie ne relève pas que du discours. Nous parlerons indifféremment de “camps d’internement”. Cela vaut spécialement pour l’expression de “camps de concentration” pourtant utilisée par certaines autorités locales, surtout en 1939 et 1940, et plus largement par les internés eux-mêmes ou la presse. Les autorités gouvernementales évitèrent de le faire, pour des raisons politiques évidentes. La querelle de mots n’est pas innocente. »[14]

Les historiens anglo-saxons ou espagnols, qui écrivent dans un contexte socio-historique différent, se posent aussi la question de la terminologie pour désigner les camps français dans lesquels ont été internés les républicains espagnols ; mais ils utilisent souvent l’expression en vigueur dans les textes administratifs et militaires de l’époque et toujours employée par les anciens internés espagnols ou par leurs descendants, celle de « camp de concentration ». D’une certaine façon, en reprenant l’expression courante en 1939 et 1940, et même s’ils analysent ces campsavec les mêmes précautions méthodologiques que leurs confrères français, ils prennent en compte le terme ancré dans la mémoire des réfugiés de la guerre d’Espagne. C’est le cas, par exemple, des historiens anglais Paul Preston, Helen Graham ou Scott Soo mais aussi de l’historienne madrilène de l’exil espagnol Alicia Alted Vigil[15]. De jeunes chercheurs français prennent également ce parti présentement[16]. Pour notre part, ayant choisi en 1989, avec Jean-Claude Villegas, le terme de « camp de réfugiés espagnols » pour le sous-titre de Plages d’exil, nous avons essayé d’expliquer, d’abord avec Émile Temime puis ultérieurement, en analysant la mémoire de ces camps, l’emploi récurrent de l’expression « camp de concentration » chez les internés espagnols, ne nous interdisant pas personnellement de l’employer pour certaines périodes et toujours en expliquant pourquoi[17].

Comment s’est forgée la mémoire des camps français chez les républicains espagnols  ?

Contrairement aux camps ouverts en période de conflit, comme cela a été le cas pendant la Première Guerre mondiale, les lieux d’internement aménagés dans la précipitation pour les réfugiés de la guerre d’Espagne n’ont pas de lien direct avec la défense du pays. Certes, le nombre de réfugiés dépasse largement les prévisions envisagées depuis des mois par les observateurs et également celles évoquées à la mi-janvier 1939 par le ministre espagnol des Affaires étrangères[18]. Mais, compte tenu de la politique de repli, de fermeture et de suspicion généralisée envers les étrangers entreprise depuis le printemps 1938, aucun préparatif n’a été effectué, même pour l’accueil d’un nombre moindre de réfugiés. L’idée d’utiliser, au moins temporairement, les infrastructures et camps militaires alors inoccupés, comme au Larzac par exemple, a été immédiatement rejetée aussitôt qu’entraperçue. La méfiance domine largement à l’égard des réfugiés républicains qui, pourtant, se sont battus pendant plus de deux ans et demi contre des ennemis communs que l’on essaie encore d’amadouer en multipliant les concessions.

Autant, entre l’été 1936 et le printemps 1938, sous le gouvernement du Front populaire, l’accueil des quelque 150000 réfugiés espagnols venus chercher asile en France au fur et à mesure de l’avancée des troupes franquistes – marquée à chaque étape par des massacres sans nombrea été solidaire et humaine, autant, en 1939, l’arrivée de ceux qui viennent en France pour sauver leur vie et leur liberté a été accompagnée de mesures vexatoires. Certes, le droit d’asile est accordé, mais tellement à contrecœur que seules des dispositions pour assurer l’ordre et la sécurité du pays ont été prises. Assurément, la situation est exceptionnelle mais l’absence de politique prospective, la crainte et l’indifférence – déjà Prague remplace Madrid dans les préoccupations françaises – font que l’État y répond en ne s’appuyant que sur les dispositifs législatifs dont il vient de se doter pour contrôler et réprimer les étrangers.

C’est ce profond malentendu qui résonne encore aujourd’hui, en ce début du XXIe siècle, dans la mémoire des descendants de l’exil républicain espagnol. Même s’ils avaient été profondément déçus par la politique de non-intervention, les républicains espagnols espéraient arriver dans la France des droits de l’homme et ils se voient traités comme des suspects, voire des malfaiteurs et des criminels. Aux souffrances physiques dues aux mauvaises conditions matérielles de vie dans les camps – qui s’ajoutent aux années de guerre et à l’exode – se surimposent surtout chez eux les souffrances morales combien insoutenables que sont la désillusion par rapport à l’image ancrée en eux d’une France des Lumières et, surtout, l’humiliation de se voir considérés comme des « indésirables ». Passe encore la vie précaire et difficile dans les camps, pour laquelle on peut alléguer l'improvisation d'un pays dépassé par le flot des réfugiés ; mais ce dont ces derniers gardent douloureusement le souvenir, ce sont la rudesse et les vexations ressenties à leur arrivée, voire l’hostilitéainsi que la suspicion permanente dans lesquelles ils ont été tenus. Comme l’écrit l’ancienne ministre de la Santé du gouvernement républicain Federica Montseny, qui a vécu avec sa famille – des parents âgés et de jeunes enfants – les mêmes conditions de l’exode que ses compatriotes :

« Rien n'avait été prévu ni préparé pour eux, c’est certain. Mais compte tenu du débordement de toutes prévisions […] on aurait pu avoir davantage d’humanité, moins de raffinement dans les humiliations, moins de cruauté dans le traitement.[19] »

Ensuite, le tragique exode des républicains espagnols a été enseveli sous les autres tragédies qu’allait générer la Seconde Guerre mondiale. Le voile de l’oubli s’est étendu assez rapidement sur cette année 1939 qui a vu s’ouvrir les premiers camps d’internement en France, lieux de privation de liberté et de non-droit, puis sur la création, pour utiliser ces internés, des Compagnies de travailleurs étrangers (CTE) placées sous commandement militaire. C’est précisément cet embrigadement dans les CTE envoyées travailler à l’organisation défensive des frontières, particulièrement à la ligne Maginot, qui vaudra aux républicains espagnols d’être les premiers déportés vers les camps nazis à partir d’août 1940. Non reconnus prisonniers de guerre comme leurs compagnons de captivité français, les Espagnols sont extraits des stalags par les autorités allemandes. Ils sont alors envoyés en Autriche, à Mauthausen, classé camp de catégorie 3 par l’administration nazie, au régime particulièrement sévère. Ils y sont rejoints dès l’été 1940 par des civils espagnols raflés en représailles à Angoulême par les Allemands ; sur les quelque 927 personnes déportées, le camp absorbera les hommes et les garçons de plus de 13 ans, les femmes et les enfants sont remis aux autorités franquistes. Le camp de Mauthausen comme d’autres camps du Reich seront la destination de nombre de résistants espagnols arrêtés dans la France occupée.

Ainsi, l’écrivain Virgilio Botella Pastor, réfugié au Mexique où l’accueil a été plus chaleureux qu’en France, explique les motifs qui le poussent, dans ses romans à caractère historique, à laisser un témoignage écrit de la guerre d'Espagne et de l'exil :

« Je souhaite exposer les causes de notre guerre et la défaite, narrer la geste des républicains espagnols qui, en exil, passèrent par les camps de concentration de France pour continuer à lutter ensuite, non pour leur liberté mais pour la liberté des autres, et mourir pour elle, depuis les sables du Sahara et de Bir Hakeim jusqu’aux neiges de Narvik en Norvège ; de l’île de Crête, comme parachutistes de l’armée anglaise, jusqu’aux plages normandes du débarquement, encadrées dans des unités anglaises et françaises ; depuis le maquis, la guérilla et la Résistance en France, jusqu’aux camps d’extermination d’Allemagne, alors qu’ensuite les survivants reçurent le prix et la récompense que nous connaissons tous et dont nous continuons encore à bénéficier. »[20]

Cette trajectoire, qui part des camps français, passe par les Compagnies de travailleurs étrangers et aboutit à Mauthausen, est restée gravée dans la mémoire des républicains espagnols comme une spirale fatale unique. D’autant que ces derniers sont persécutés par les nazis avec l’appui du régime franquiste. Ramón Serrano Suñer, ministre de l’Intérieur et beau-frère de Franco, est à Berlin en septembre 1940 quand est émise la consigne écrite de mettre les anciens « combattants rouges d’Espagne » dans des camps du Reich, l’exécution ayant précédé l’ordre formel. Le régime de Vichy, qui s’emploie à les réprimer, ne les a, bien entendu, pas mentionnés dans la convention d’armistice. Les républicains espagnols ont connu également une longue répression dans l’Espagne franquiste après la fin « officielle » des combats : des milliers de fusillés, plus d’une centaine de campos de concentración, une multitude de prisonniers employés à des travaux forcés dans des bataillons disciplinaires, des centaines de fonctionnaires évincés. Dans les camps de concentration franquistes, on « rééduquait » les prisonniers, on les torturait, afin d’annihiler toute velléité de résistance. Tout cet enchaînement répressif fait que la mémoire des républicains espagnols n’a retenu que l’expression unique de « camp de concentration ». Comme le précise, cinquante ans après la Retirada, le socialiste Antonio Gardó Cantero, l’un des animateurs du travail culturel entrepris dans le camp d’Argelès, puis résistant dans les maquis du Languedoc :

« J’ai toujours pensé que ces camps que nous appelons camps de concentration devaient être placés au troisième rang de la souffrance du peuple espagnol. Il y eut en premier lieu les camps allemands où beaucoup d’Espagnols sont morts. Puis les camps de concentration d’Espagne et enfin les camps français. »[21]

Après la guerre mondiale, après les combats ou à leur sortie éventuelle des camps nazis, la plupart des résistants antifascistes survivants ont pu retrouver leur pays, que ce soit les Français, les Italiens, les Allemands ou les ressortissants des pays de l’est de l’Europe. Même si cela n’a pas toujours été simple pour ces tout derniers, les exilés espagnols n’ont pu, eux, regagner leur pays d’origine. Ils sont restés en France ou y sont retournés à leur retour de déportation. La longue dictature franquiste, l’une des plus sanglantes d’Europe, n’a pas revendiqué leur action pendant la guerre mondiale et n’a cessé de les poursuivre de sa vindicte. En France, les gouvernements issus de la Résistance ont soutenu, jusqu’en 1948, les exilés espagnols qui avaient combattu avec les Français dans les maquis et pris une part importante à la lutte contre l’occupant. Mais aucun des pays vainqueurs de la guerre mondiale n’a souhaité remettre en cause le statu quo en Espagne et les condamnations du régime franquiste sont restées purement morales, donnant aux républicains espagnols le sentiment amer d’un second abandon international après la non-intervention. Puis, la survenue de la guerre froide, les changements de majorité politique, le souci des pays anglo-saxons, mais également de l’URSS, de ne pas provoquer de bouleversements dans la Péninsule ibérique et l’entrée de l’Espagne franquiste à l’ONU en 1955 firent que la voix des républicains espagnols se heurta peu à peu à l’indifférence générale.

Les républicains espagnols ont ressenti, durant leur interminable exil, le lourd poids du silence qui, en France comme en Espagne, s’est abattu sur leur histoire et leur tragédie tant collective qu'individuelle. Ainsi, vaincus et stigmatisés en Espagne, ils sont passés en France du statut d’indésirables à celui d’anciens combattants oubliés et ce, pendant des décennies. Se mêle sans doute dans l’inconscient collectif français, se superposant, la mauvaise conscience éprouvée pour les camps d’internement érigés lors de l’arrivée des réfugiés espagnols et pour une dette de sang non honorée. Les exigences du pragmatisme politique d’État l’ont emporté ensuite sur toute autre considération.

En Espagne, pendant des décennies, les républicains étaient considérés comme des vaincus dont il fallait effacer toute trace. Après le retour de la démocratie en Espagne, ce n’est que progressivement que l’histoire de la guerre et de l’exil a ressurgi. C’est seulement au XXIe siècle que l’exil et la répression franquiste sont entrés dans le débat public avec la fameuse déclaration des Cortès en 2002. La loi de Mémoire historique adoptée en 2007 permet certaines avancées par rapport à la reconnaissance des républicains persécutés par le franquisme mais les sentences des tribunaux d’exception qui s’étaient érigés en juges des « délits politiques » ne sont toujours pas abrogées. La loi d’amnistie de 1977 constitue jusqu’à ce jour un verrou juridique.

En France, les républicains espagnols, considérés en 1939 comme des « étrangers indésirables », ont participé en nombre à la guerre mondiale aux côtés des Alliés et à la Résistance au coude à coude avec les Français et d’autres étrangers. Mais pendant des décennies, leur participation à la Seconde Guerre mondiale aux côtés des Français – et particulièrement à la Résistance – a été longtemps un fait peu connu, oublié des historiens français jusqu’à une date fort récente[22] et, en tout cas, largement absent de la mémoire collective française. Les raisons de cet « oubli historique » sont multiples et on ne peut les évoquer ici, mais cette longue amnésie les concernant a figé les mémoires et cette histoire encore en suspens n’a pas permis une cicatrisation des blessures morales.

C’est donc une mémoire encore à vif qui a commencé à émerger à la fin du siècle dernier, tant en Espagne qu’en France, et qui a acquis, en cette première décennie du XXIe siècle, un fort développement et une certaine visibilité[23]. Les pouvoirs publics français rendent depuis quelques années des hommages aux républicains espagnols[24]. De nombreuses associations mémorielles se sont créées dans les deux pays. En France, Caminar, une coordination nationale d’associations mémorielles espagnoles s’est créée en 2014, regroupant présentement une quinzaine d’associations. Il n’est pas indifférent que l’une des premières associations créées, au tournant des deux siècles, se soit appelée FFREEE, Fils et Filles de républicains espagnols et enfants de l’exode, calquant son nom sur celui de l’association créée par Serge et Beate Klarsfeld, afin de prendre exemple sur ce dynamisme associatif pour faire connaître et reconnaître l’histoire de l’exil espagnol. Car, en France comme dans une grande partie du monde occidental, le contexte mémoriel a connu des évolutions notables. Il s’est développé, depuis les années 1990, une intense concurrence de mémoires[25]. La mémoire juive s’est convertie en paradigme, en modèle, de « régime victimo-mémoriel » et les autres groupes qui sentaient une identité particulière – comme les descendants d’Arméniens, d’esclaves ou de colonisés – ont commencé à apparaître dans l’espace public. De fait, comme l’analyse Esther Benbassa : « La mémoire de la Shoah servit d’exemple à différents groupes qui, à juste titre, demandent que leur mémoire de souffrance trouve sa place dans la mémoire collective française. »[26]

Les mots pour le dire

Pendant toute la durée de l’exil, les républicains espagnols utilisent l’expression de « camp de concentration » pour désigner les camps français et c’est le cas aujourd’hui encore de leurs descendants. Et cela, même après la terrible expérience des camps nazis – que nombre d’entre eux ont par ailleurs connue. Ce choix linguistique, inconscient ou revendiqué, exprime la profondeur de la blessure ressentie et montre que sont englobés dans une même réprobation les camps français et nazis, quels que soient le degré et la nature de l’horreur. Alors que les républicains espagnols savaient par l’expérience de la guerre d’Espagne, pour les avoir affrontés, qu’ils n’avaient rien à attendre et tout à redouter des nazis, ils sont extrêmement blessés de « l’accueil » français. Aussi, le même terme sert-il à désigner les camps français et allemands, en dépit de la connotation ultérieure donnée par les génocides programmés dans les seconds. Comme l’écrit Lluis Montagut dans son témoignage :

« Bien avant que les Allemands la pratiquent à grande échelle dans leurs camps de concentration, on a expérimenté avec nous cette science du rabaissement moral des individus, de la destruction méthodique de toutes les valeurs morales, faisant de la personne humaine… une bête affamée, sale, obsédée par ses besoins les plus élémentaires. »[27]

Dans la langue castillane, l’expression « camp de concentration » est toujours employée pour désigner ces lieux d’internement et, au-delà de son contenu véritable, ce qui est en jeu, dans son emploi récurrent – y compris en français – c’est le poids mémoriel d’un vécu longtemps oblitéré voire occulté. Et l’on peut constater que, plus le temps passe et plus cet emploi est réaffirmé. Les associations mémorielles espagnoles émergentes ont dû se contenter, en 1999, d’un monolithe indiquant l’emplacement d’un « camp » pour réfugiés espagnols sur la plage d’Argelès-sur-Mer, sans autre précision. Mais, en 2009, sous leur pression, la grande plaque apposée à la limite nord de l’ancien camp le dénomme comme en 1939, à savoir « camp de concentration » [28].

L’un des tout premiers témoignages publiés sur les camps est un long poème écrit en 1944 au Mexique par Miguel Giménez Igualada, libertaire espagnol émigré à Mexico, après trois ans d’internement en France. L’auteur du poème proclame que sa religion est de croire en l’homme et il est cependant obligé d’évoquer la vie des réfugiés espagnols dans les camps français, « ce cercle de la haine », cette « muraille de vilenie » ; ces camps qui, en fait, renfermaient « des peintres, des musiciens, des sculpteurs, des médecins, des écrivains, des hommes qui vécurent dévorés de nobles idéaux, des humanistes […], le meilleur et le plus noble de la pensée hispanique ». C’est de ce contraste entre les conditions de l’accueil en France confrontées à la riche expérience politique et culturelle vécue en Espagne, à la guerre menée courageusement contre un ennemi intérieur et extérieur et, pour certains, aux tentatives de transformation révolutionnaire de la société que naissent « la douleur, l’angoisse, la tristesse et le désespoir, entre la boue et le sable, le fumier et les loques, les injures et le mépris ».

« Il est des noms français que les Espagnols ont gravés, pour toujours, dans leur cœur. Des noms français que les parents apprendront à épeler à leurs enfants ; qui seront sculptés dans la roche nue des crêtes pyrénéennes afin qu’ils se perpétuent à travers le temps et maintiennent vivant et frais le souvenir de la douleur ; qui se répandront par les chemins et inonderont la Péninsule afin que tous sachent et que nul n’oublie ce que sont la haine et le crime ; qui protesteront éternellement contre le manque de solidarité et l’indifférence. Il est des noms français que les Espagnols ont gravés, pour toujours, dans leur cœur. Argelès-sur-Mer, Le Barcarès, Gurs, Bram le maudit, l’infernal Vernet, le château de la mort de Collioure, Rivesaltes (ramassis de femmes espagnoles, pâture pour Sénégalais), la tuilerie des Milles, où la crasse et la douleur atteignirent des sommets, Saint-Cyprien… Camps de concentration dont la France a semé son territoire pour étouffer, dans l’opprobre, la pensée hispanique. Des barbelés ! Encore des barbelés ! »[29]

Cependant, les camps d’internement en France sont peu évoqués dans l’abondante presse de l’exil espagnol éditée dans l’Hexagone, quelque 650 titres[30]. Les modestes bulletins confectionnés dans les camps ne contiennent pas de critiques sur les conditions de vie des internés. Leur contenu, exclusivement culturel, leur permet seul d’exister au grand jour et de braver la censure exercée par les autorités. Aussi, l’humour comme la volonté éducative y introduisent-ils une certaine distance. Le journal Voz de Madrid, édité à Paris en 1939 par le gouvernement républicain lui-même, entreprend une série de reportages sur les camps ; mais, pour faire pièce au journal Le Matin qui évoque des « étrangers indésirables », ces articles souhaitent surtout montrer la diversité sociale des Espagnols internés : fonctionnaires ou « soldats d’une grande armée victorieuse vingt fois de la non-intervention et des Espagnols de toutes les classes qui ont défendu l’Espagne ».[31] 

Au lendemain de la guerre mondiale, un journal catalan comme Foc Nou parle, dans une série d’articles, des charmes et des disgrâces de l’exil sur un ton qui se veut distancié[32]. D’après l’auteur, les Catalans internés à Agde n’ont pas perdu leur inépuisable bonne humeur et leur fine ironie jusqu’au moment où se sont constituées les premières Compagnies de travailleurs étrangers, « incarnation de l’esclavage moderne [qui] va blesser encore plus la susceptibilité et la dignité des exilés en France que ne l’avaient fait jusqu’alors le sable et la boue et les barbelés des camps de concentration ». En 1946, un article de L’Espagne républicaine se penche à son tour sur « Ce que les réfugiés vont oublier ». Il est rappelé que des centaines de réfugiés sont morts de faim et de froid, notamment au cours des nuits de tramontane glacée, faute de baraquements suffisants. L’auteur demande au gouvernement en exil de rechercher, pour une évaluation précise, la liste des réfugiés décédés dans les camps, car « pour aussi macabres que soient ces statistiques, elles doivent être faites car elles aideront à calibrer les angoisses des camps de concentration du sud de la France ». Le souhait est exprimé d’une histoire des Compagnies de travailleurs et du maquis espagnol, car il ne s’agit pas de faire œuvre « d’animosité et de reproches », mais de servir à l’histoire de l’émigration espagnole et d’écrire « le Livre de la Mort, le Livre du Travail et le Livre de la Gloire »[33] . Ultérieurement, on trouve peu d’évocations des camps dans les journaux de l’exil, surtout consacrés à la lutte antifranquiste, à la préservation d’une identité culturelle hispanique et à la transmission d’un héritage historique ; probablement aussi l’effet d’une certaine autocensure par rapport aux autorités françaises de qui dépend l’autorisation de paraître limite-t-elle les témoignages sur les camps à quelques rares récits individuels.

Ce sont donc essentiellement des ouvrages, parfois simples brochures, souvent édités en supplément de revues, qui contribuent à forger les mémoires de l’exil. Mais, à part quelques publications parues immédiatement au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, ces témoignages sont édités tardivement. Il faudra attendre la fin des années 1960 pour que d’autres récits sur les aléas de l’exil voient le jour, tant les exilés espagnols sont surtout préoccupés alors par la lutte contre la dictature franquiste et le quotidien de leur exil et peu enclins à se pencher sur leur vécu[34]. Les camps français sont toujours désignés comme des « camps de concentration » .

Selon le corpus que Bernard Sicot a entrepris d’établir sur la littérature espagnole relative aux camps français[35], quelque 122 titres publiés ont pu être recensés, Mémoires et témoignages comme œuvres à caractère littéraire. Sur les 75 étudiés, 31 ont été édités au Mexique, 26 en Espagne, 7 en France – généralement en castillan ou en catalan – ou dans d’autres pays. Les titres sont souvent éloquents. Quelques exemples : Argelès-sur-Mer (campo de concentración para españoles) de Jaime Espinar (Caracas, 1940) ; Alambradas : mis nueve meses por los campos de concentración de Francia de Manuel García Gerpe (Buenos Aires, 1941) ; Saint-Cyprien, plage… (campo de concentración) de Manuel Andújar (Mexico, 1942)[36] ; Campos de concentración, 1939-194… de Narcís Molins i Fábrega et Josep Bartolí (Mexico, 1944) ; Cartes des dels camps de concentració de Père Vives i Clavé[37] (Barcelone, 1972) ; Mis campos de concentración de Cesáreo de la Cruz y Gómez (Ségovie, 1978) ; Derrière les barbelés. Journal des camps de concentration en France (1939) de Eulalio Ferrer (Limonest, 1993) ; ou Campo de concentración (1939) de Lluís Ferran de Pol (Barcelone, 2003).

Souvent peu connus en France, ces nombreux textes font référence à une période d’histoire pourtant partagée entre Espagnols et Français et que ces derniers ont longtemps occultée ou, pour le moins, effacée de leur mémoire collective : c’est avec l’asile accordé avec une telle réticence aux défenseurs d’une démocratie amie que fut inaugurée la triste histoire des camps français de la Seconde Guerre mondiale. Ces zones de non-droit, où la dignité humaine était souvent bafouée, où l’on pouvait mourir à 20 ans d’une épidémie causée par une eau insalubre ou d’affection pulmonaire contractée à cause des intempéries.

L’historien a le devoir d’utiliser une terminologie qui ne prête pas à confusion, d’éclairer le public sur les différences de nature entre les divers systèmes concentrationnaires et s’il emploie une expression historiquement datée il doit toujours, inlassablement, la contextualiser. Mais il a aussi pour mission de comprendre et d’expliquer pourquoi, depuis près de quatre-vingts ans, les républicains espagnols et leurs descendants désignent immanquablement les camps français par l’expression « camps de concentration ».

 


[1] Annette Wieviorka, « L’expression camp de concentration au XXe siècle », Vingtième siècle. Revue d’histoire, n° 54, avril-juin 1997, pp. 4-12. Geneviève Dreyfus-Armand, « De quelques termes employés (camps d’internement, de concentration, d’extermination) : de leur signification historique à leur poids mémoriel », in De l’exil et des camps. Écrire et peindre, de Max Aub à Ramón Gaya, Bernard Sicot (éd.), Regards [Centre de recherches ibériques et ibéro-américaines (CRIIA-EA 369), Groupe de recherches résistances et exils (GREX), université Paris-Ouest Nanterre La Défense], n° 12, 2008, pp.19-31.

[2] Anne Grynberg, « 1939-1940 : l’internement en temps de guerre. Les politiques de la France et de la Grande-Bretagne », Vingtième siècle, op. cit.,  pp. 23-33. David Cesarani, « Camps de la mort, camps de concentration et camps d’internement dans la mémoire collective britannique », ibid., pp. 13-23.

[3] Journal officiel. Lois et décrets, 3 mai 1938, pp. 4 967–4 969 et 13 novembre 1938, pp. 12 920–12 923.

[4] Ibid.

[5] La Dépêche du 2 février 1939, cité par Marie-Claude Rafaneau-Boj, Odyssée pour la liberté. Les camps de prisonniers espagnols, 1939-1945, Paris, Denoël, 1993, p. 117.

[6] Cité par Grégory Tuban, Contrôle, exclusion et répression des réfugiés venus d’Espagne dans les camps du sud de la France. 1939-1944, thèse de doctorat d’histoire, université de Perpignan, 2015, p. 30.

[7] Maëlle Maugendre, Les Réfugiées espagnoles en France (1939 - 1942) : des femmes entre assujettissements et résistances, thèse de doctorat d’histoire, université Toulouse-2, 2014, p. 280.

[8] Bernard Sicot, Djelfa, 41-43 : un camp d’internement en Algérie, Paris, Riveneuve, 2015.

[9] Le livre de Raul Hilberg, The Destruction of the European Jews, passé inaperçu lors de sa publication en 1961 à Chicago, n’a été publié en français qu’en 1988.

[10] Claude Laharie, Le Camp de Gurs 1939-1945. Un aspect méconnu de l’histoire du Béarn, Pau, Infocompo, 1985, p. 120 éd. de 1993 (Pau, J & D éditions).

[11] Jean-Claude Villegas (coord.),  Plages d’exil. Les camps de réfugiés espagnols en France, 1939, Nanterre/Dijon, BDIC/Hispanistica XX, 1989, p. 11.

[12] L’expression est de David Rousset qui a connu, comme résistant, les camps nazis et a dénoncé aussi les camps du goulag soviétique (L’univers concentrationnaire, Paris, Éd. du Pavois, 1946 ; pp. 113-115 dans l’édition des Éd. de Minuit de 1965).

[13] Annette Wieviorka, « L’expression camp de concentration au XXe siècle », art. cit., p. 12.

[14] Denis Peschanski, Les camps français d’internement, 1938-1946, thèse de doctorat d’État, 2000, p. 5.

[15] Helen Graham. The War and his Shadow : Spain’s Civil War in Europe’s Long Twentieth Century, Eastbourne, Sussex Academic Press, 2012 ; Paul Preston, Doves of War : Four Women of  the Spanish Civil War, New York, Harper Collins, 2010 ; Paul Preston, El Holocausto español. Odio y exterminio en la Guerra Civil y después, Barcelone, Debate, 2011 ; Scott Soo, The Routes of exile. France and the Spanish Civil War refugees, 1939-2009, Manchester, Manchester University Press, 2013 ; Alicia Alted Vigil, La voz de los vencidos. El exilio republicano de 1939, Madrid, Aguilar, 2005 ou, avec Lucienne Domergue, La cultura del exilio anarcosindicalista español en el sur de Francia, Madrid, Cinca, 2012.

[16] Voir les travaux de Maëlle Maugendre ou Grégory Tuban cités plus haut.

[17] Plages d’exil, Les camps de réfugiés espagnols en France, 1939, op. cit. ; Geneviève Dreyfus-Armand, Émile Temime, Les camps sur la plage, un exil espagnol, Paris, Autrement, 1995 ; Geneviève Dreyfus-Armand, L’Exil des républicains espagnols en France, de la Guerre civile à la mort de Franco, Paris, Albin Michel, 1999.

[18] Julio Alvarez del Vayo demandait alors à la France d’accueillir quelque 150 000 réfugiés ; mais, pour lui comme pour le reste du gouvernement Negrín, la guerre n’était pas terminée.

[19] Federica Montseny, Pasión y muerte de los Españoles en Francia, Toulouse, Espoir, 1969, p. 22. Texte paru en plusieurs livraisons dans El Mundo al día en 1950 et rassemblé dans cette édition.

[20] Virgilio Botella Pastor, « Porque escribo sobre la guerra y el destierro », Anales. Ateneo ibéro-americano, 1969, n° 5, pp. 1-9 ; conférence prononcée le 13 décembre 1969.

[21] « Entretien avec Antonio Gardó », in Plages d’exil, op. cit., p. 227.

[22] Le premier colloque scientifique à l’étudier est celui consacré aux Italiens et Espagnols en France, 1938-1946 tenu à Paris en novembre 1991 (publié sous le titre Exils et migration, chez L’Harmattan, en 1994).

[23] Geneviève Dreyfus-Armand, « La memoria en el exilio español en Francia : de una generación a la otra, en un contexto memorial específico », Migraciones e Exilios, n° 15, 2015, pp. 13-29.

[24] Depuis les années 2004-2005, de nombreuses régions ou villes françaises ont reconnu le rôle des républicains espagnols dans la libération du pays. Ainsi, la Ville de Paris, en 2004, pour la libération de la capitale où, depuis, des plaques jalonnent le parcours de la Nueve de la 2e DB du général Leclerc, compagnie composée majoritairement d’exilés espagnols.

[25] Les guerres de mémoires. La France et son histoire, Pascal Blanchard et Isabelle Veyrat-Masson (éds), Paris, La Découverte, 2008.

[26] Esther Benbassa, « La concurrence des victimes », in Culture post-coloniale, 1961-2006, Pascal Blanchard et Nicolas Bancel (dir.), Paris, Autrement, 2006, pp. 102-112.

[27] Lluis Montagut, J’étais deuxième classe dans l’armée républicaine espagnole, Paris, François Maspero, 1976, p. 58.

[28] Plaque inaugurée par Anne Hidalgo, alors première adjointe au maire de Paris.

[29] Miguel Giménez Igualada, « Dolor », in Antonio Berna Salido, Somos : homenaje de los republicanos españoles a las representaciones diplomática y consular de México en Francia, Mexique, Publicaciones Somos, 1944.

[30] Geneviève Dreyfus-Armand, L’émigration politique espagnole en France au travers de sa presse, 1939-1975, thèse de doctorat, Institut d’études politique de Paris, 1994.

[31] Voz de Madrid, n° 38, 1er avril 1939.

[32] Josep Torrents, « Gracies i desgracies de l’exili », Foc nou, no 12 (25 novembre), no 13 (2 décembre), no 15 (16 décembre 1944).

[33] L’Espagne républicaine, n° 56, 20 juillet 1946 (article signé Simone Martin).

[34] Excepté Le Grand voyage de Jorge Semprún (Paris, Gallimard, 1963), qui concerne uniquement la déportation dans les camps nazis ; Manuel Razola, Mariano Constante, Le Triangle bleu. Les républicains espagnols à Mauthausen, Paris, Gallimard, 1969 ; Antonio Vilanova, Los Olvidados. Los exiliados españoles en la Segunda Guerra mundial, Paris, Ruedo Ibérico, 1969.

[35] Voir www.cermi.fr, liens. Bernard Sicot, « Literatura española y campos franceses de internamiento. Corpus razonado (e inconcluso) », Cahiers de civilisation espagnole contemporaine [En ligne], 3 | 2008, mis en ligne le 20 juin 2011, consulté le 29 octobre 2016.

[36] Édité en français récemment par Rose Duroux : Manuel Andújar, Saint-Cyprien, plage… (camp de concentration), Clermont-Ferrand, Presses universitaires Blaise Pascal, 2003.

[37] Il s’agit des camps français, l’auteur est mort à Mauthausen en 1941. Bernard Sicot en a édité une traduction française en 2013.

 

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